Aimer sans crainte

Écrit par Jeremy Favreau

Chaque être humain désire aimer et être aimé. Pourtant, entrer en relation de manière profonde avec les autres est un défi pour plusieurs. La crainte de ne pas être à la hauteur et d’être rejeté pousse beaucoup de gens à ne livrer qu’une partie superficielle de leur personne aux autres, espérant ainsi se protéger du danger de l’intimité. Instaurer une culture familiale sûre et remplie de grâce contribuera au développement relationnel de chaque membre de votre foyer, et aidera vos enfants à bâtir des relations sincères avec les autres.

Selon le neurologue et psychanalyste Viktor Frankl, il est impossible de saisir sa raison d’être sans entretenir des relations saines et pleines d’amour sincère. En l’absence de ces relations, un vide se crée au fond de la personne. Et ce que nous savons tous à propos du vide — qu’il s’agisse d’un estomac ou du fond d’un placard — c’est qu’il finit toujours par être rempli par quelque chose.

Si nos enfants grandissent sans réussir à combler ce besoin relationnel fondamental à leur épanouissement, ils vont se tourner vers un substitut pour remplir leur vide intérieur. Il faut donc leur offrir un environnement familial où ils apprendront à créer et entretenir des relations saines, intimes et authentiques. Notre but doit être de les aider à aimer sans crainte.

Un endroit sûr

Pour que les enfants puissent apprendre à aimer sans crainte, ils doivent tout d’abord se savoir en sécurité. La maison est naturellement l’endroit où cette sécurité devrait se développer. Si le foyer d’un enfant est un endroit où l’ordre doit régner à tout prix, ou du moins l’apparence de l’ordre, un enfant pourra bien se sentir incapable de s’ouvrir et de parler de ses combats et ses échecs. Les parents, comme les enfants, luttent contre des défauts enracinés et des habitudes que nous préférerions ignorer. Mais c’est justement ces choses, lorsqu’elles restent enfouies et cachées, qui nous éloignent des autres et de l’amour que nous désirons partager.

La Bible nous enseigne un principe qui n’est plus très à la mode. Ce principe est celui de la confession. Avouer que nous avons peur, que nous avons manqué notre coup, que nous avons péché, que nous n’aimons pas quelqu’un ou que nous éprouvons des doutes n’est pas chose facile. Cela est d’autant plus vrai si nous avons grandi avec des parents qui ne semblaient éprouver aucune difficulté et qui parlaient comme si tout allait toujours bien. Nous ne réalisons pas que de ne pas vivre sous son vrai jour nous isole des autres, puisque nous ne leur permettons pas de nous connaître réellement. Nous vivons dans la crainte d’être découverts. Si nous vivons comme cela, nos enfants feront de même et ne connaitront pas la sécurité de grandir en sachant qu’ils seront aimés quoi qu’ils aient pensé ou fait. De plus, c’est contraire à l’enseignement biblique.

Sur le chemin de la perfection

La Bible n’enseigne-t-elle pas qu’il faut être « parfait, comme votre Père céleste est parfait » (Mat. 5.48) ? Certainement. Que faire alors lorsque ce n’est pas le cas ? Sommes-nous condamnés à désobéir à ce commandement pour la durée de nos jours ? Ou bien devons-nous mentir en prétendant que c’est le cas, tout en nous efforçant d’atteindre la perfection seul dans notre coin ?

Ni l’un, ni l’autre, heureusement, car ce n’est pas le sens que Jésus entendait par cette phrase. Lorsque Jésus prononça ces mots dans le Sermon sur la montagne, il voulait attirer l’attention de ses auditeurs sur le fait qu’ils n’étaient pas encore parfaits. Après avoir commencé le sermon par les béatitudes et une description de la pureté de cœur que Dieu recherche, qui pouvait honnêtement se dire arrivé à destination ? Personne. Et c’est justement la conclusion que Jésus voulait soulever chez ses auditeurs, car c’est cette confession qui laisse entrer l’action de Dieu dans nos vies.

C’est pourquoi, dans le chapitre suivant, Jésus enseigne à ses disciples la confession comme élément essentiel de la prière. Pardonne-nous nos offenses se retrouve en plein milieu de la prière que Jésus nous légua comme modèle de toutes nos prières futures. Il s’attend à ce que nous ayons besoin de grâce chaque jour de nos vies, et il nous invite à la rechercher avec audace et humilité. Le mot grec que nous traduisons par « parfait » veut aussi dire « complet. » Dieu veut nous transformer et il promet de compléter l’œuvre qu’Il a commencée en nous (1 Thes. 5.23). Mais il veut que nous venions à lui tels que nous sommes, pas que nous nous cachions de lui dans la honte en attendant d’être perfectionnés. Cette fondation de la grâce de Dieu est ce qui nous ouvre la porte à l’amour sans entraves.

Modeler la grâce

Que vous soyez parent ou non, vous avez de l’influence sur les gens qui vous entourent. Mais pour plusieurs d’entre nous, cette influence est grandement amoindrie parce que nous avons peur de nous livrer avec sincérité. Avez-vous déjà expérimenté la liberté qui accompagne le fait de ne plus rien avoir à cacher ? C’est l’un des soulagements les plus intenses que nous pouvons expérimenter, puisque cela nous libère de notre crainte des autres et nous permet de créer le type de connexion après laquelle nos âmes soupirent.

Pensez à vos collègues, amis, ou simplement les gens assis en face de vous dans le bus pendant votre retour du boulot. Tous ces gens désirent être connus pour qui ils sont réellement et vivent, peut-être bien depuis leur enfance, sans pouvoir librement aimer les autres, par crainte de trop dévoiler et d’être méprisés ou rejetés. Maintenant, regardez vos enfants, et posez-vous la question suivante : est-ce que je veux qu’ils deviennent des adultes comme ça ?

Dès leur plus jeune âge, les enfants s’imprègnent des mœurs qu’ils voient chez leurs parents. Que leur modelez-vous ? Qu’il faut performer à tout prix, selon les standards établis, même si cela veut dire cacher son état réel, ses combats, ses échecs, ses tristesses ? Ou bien leur montrez-vous par votre propre ouverture et authenticité que la vie est un processus de transformation, un trajet sur lequel nous cheminons tous ? Leur donnez-vous la permission d’être une œuvre en devenir, en confessant les domaines dont vous n’êtes vous-même pas encore arrivé à la perfection ? Leur enseignez-vous que Jésus lui-même s’attend à ce que nous ayons des manquements à confesser tous les jours, et qu’il désire seulement les voir venir à lui exactement comme ils sont ?

Bannir la crainte

Voici trois manières d’aider vos enfants à grandir dans la grâce et à devenir des personnes capables d’aimer les autres librement et sans crainte :

  1. Priez ensemble en réponse à la grâce. Il est impossible de prier sans qu’il y ait la confiance en Dieu. Lisez des passages ou nous sommes conviés à la grâce (Mat. 11.28-30 ; Jean 3.16-17 ; Jacques 5.16), et rappelez à vos enfants que bien que Jésus désire que nous devenions parfaits en lui, il ne s’attend pas à ce que nous soyons parfaits avant de venir à lui.
  2. Soulevez les histoires et les événements qui communiquent la grâce de Dieu. Les aperçus de la grâce abondent, autant dans la culture populaire que dans la vie de tous les jours. Encouragez vos enfants à lire des livres et à écouter des films qui communiquent la grâce et parlez-en avec eux par la suite. Demandez-leur de chercher dans les événements de leur journée des moments où ils ont vu la grâce à l’œuvre. Remerciez Dieu pour ces aperçus et dans les cas où ils ont été témoins du contraire, intercédez pour ces situations. C’est par l’unique grâce de Dieu que nous ne passons pas nos journées entières à nous déchirer les uns les autres. Reconnaître ce fait portera vos enfants à intérioriser l’importance de la grâce dans leurs vies.
  3. Confessez vos luttes, vos échecs et votre besoin de la grâce de Dieu. Vos enfants ne vous aimeront pas moins si vous leur dites : « J’ai perdu patience avec mon collègue aujourd’hui et me suis emporté avec colère pendant un moment. J’ai dû ensuite lui demander pardon. » En faisant ainsi preuve d’humilité, tout en refusant de sombrer sous la honte et la condamnation, vous démontrez puissamment comment un chrétien progresse vers la maturité. En voyant que vous ne craignez pas que Dieu vous rejette, ils sauront qu’ils peuvent eux aussi, en parfaite sécurité, partager ce qui leur pose problème, car ils seront aimés quoiqu’il arrive. Ils verront également la souffrance que vivent les gens qui ne se savent pas aimés inconditionnellement comme eux. Ils ne verront pas dans les autres des ennemis de qui se méfier, de qui se cacher, mais des personnes à aimer et avec qui être vrais.

Lorsque nous nous savons aimés par Dieu, tels que nous sommes, nous sommes libres d’aimer les autres tels qu’ils sont. Assurons-nous que nos enfants puissent profiter pleinement de cette liberté.

Jeremy Favreau est auteur et leader créatif chez Pouvoir de Changer – Étudiants. Passionné des grandes questions, il est toujours prêt à dialoguer sur l’Évangile, la culture et leurs innombrables points de rencontre. Lui et son épouse Selene résident à Montréal et sont parents de trois garçons.

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