Comment prier ?
Ecrit par Dominique Ourlin
Conseils pratiques (et pas du tout barbants) de Luther à son barbier
L’année 2017 a été l’occasion de célébrer le 500e anniversaire de la Réforme protestante. Si Calvin et Luther étaient des étudiants et des érudits de la Parole, ils n’en étaient pas moins des hommes qui aimaient la Bible pour ce qu’elle est : un véritable cœur à cœur entre Dieu et les hommes.
L’histoire qui suit souligne le lien étroit que Luther établissait entre prier et méditer[1].
Peter Beskendorf, alors barbier de Luther, lui demanda un jour de lui enseigner un moyen simple de prier. Celui-ci lui envoya alors une lettre de conseils riches et pratiques toujours d’actualité[2].
Luther suggère tout d’abord de prier deux fois par jour – le matin avant d’entreprendre quoi que ce soit et le soir. Si cela pouvait sembler bien ritualiste, c’est en réalité une excellente discipline de « cadrage » de notre journée.
« Il est bon que la prière soit notre première et notre dernière occupation de la journée. Il faut écarter la pensée fausse et trompeuse suivante : “Attends un peu ; dans une heure ou plus, tu prieras. Termine d’abord ceci ou cela.” Si nous accueillons cette pensée, la journée se passera à l’accomplissement de tâches diverses sans que nous priions. »
Il l’appelle aussi à accorder à ces temps de prière toute son attention, tout comme il le fait pour sa tâche quotidienne :
« Un barbier habile, lorsqu’il est en train de faire la barbe à un client, doit fixer toute son attention sur le rasoir et la barbe. S’il ne fait que parler, regarder ailleurs ou penser à autre chose, il risque fort d’entailler la bouche ou la gorge de son client. Ainsi, pour faire quelque chose de bien, il faut y impliquer tout son être. Comme on dit : Celui qui pense à trop de choses ne pense à rien et n’accomplit rien de bon ! À plus forte raison, la prière, pour être une bonne prière, doit-elle être seule à occuper totalement le cœur ! »
« Fais ce que tu fais » dit le proverbe. Ou encore « Sois à ce que tu fais ». Tout un défi de nos jours ! Mais il est à notre portée… avec l’aide de Dieu !
Il ajoute encore :
« Veillez à ne pas être trop exigeant afin que votre esprit ne se fatigue pas. Une bonne prière n’a pas besoin d’être longue ou prolongée. Il est préférable qu’elle soit fréquente et ardente. »
Priant souvent à partir des commandements de Dieu, il précise : « Je fais de chaque commandement une guirlande de quatre brins tressés ensemble. En d’autres termes, chaque commandement est d’abord un enseignement — ce qu’il est effectivement — et je réfléchis à ce que le Seigneur me demande si sérieusement. Chaque commandement est, en second lieu, un sujet de louange ; en troisième lieu, une confession et, enfin, une requête. »
Il dira du Notre Père : « Je l’absorbe comme un nourrisson, je le mange et le bois comme un vieillard et n’en suis jamais rassasié… Il arrive souvent que mes pensées partent en promenade à propos d’une des demandes du Notre Père et que j’abandonne les six autres. Quand il en est ainsi, il faut laisser de côté les autres prières et accueillir ces pensées, les écouter en silence et ne les réprimer en rien. C’est le Saint-Esprit lui-même qui prêche et un seul mot de son sermon vaut mieux que les milliers prononcés dans nos prières. J’ai ainsi plus appris dans une seule prière que par beaucoup de lectures et de réflexions. »
Seigneur, alors que j’ouvre ta Parole, que je désire la méditer et que je te prie, apprends-moi à prendre un peu de distance, à faire silence, ne serait-ce qu’un moment, pour être tout simplement disponible devant toi, présent à ta présence.
Pardon pour tous mes faux pas, mes mauvais choix, mes écarts, mes négligences, mes découragements, mes égarements. Accorde-moi une intelligence renouvelée pour percevoir, au-delà du sens premier des mots, leur portée dans ma réalité d’aujourd’hui, de mes relations, de mes occupations.
Je m’abandonne à toi. C’est alors seulement que je me trouve ! Je te livre mon avenir et mon devenir. Je veux vouloir ce que tu veux. Tout ce que tu veux. Rien que ce que tu veux. Oui, que ta volonté soit faite en moi. Dès ici et maintenant.
Apprends-moi à lire ta Parole lentement, attentivement, patiemment, et à la laisser pénétrer mes pensées, mes émotions, mes recoins les plus secrets. À me façonner. Me reconstruire. Me nourrir. Je deviendrais alors un peu plus ce que je suis à tes yeux — un enfant racheté, libéré, qui peut marcher avec assurance, sans arrogance ni crainte. Parce que tu es mon Père. Amen ! (qu’il en soit ainsi !)
Quelques textes à méditer autour des cinq « piliers » de la Réforme qui sont aussi les piliers de notre foi :
L’Écriture seule : Jean 15.5-8, 2 Timothée 3.16-17
Christ seul : Jean 14.5-11, 1 Timothée 2.5-6
La Grâce seule : Éphésiens 2.8-10, Tite 2.11-14
La Foi seule : Jean 3.14-17, Romains 10.5-11
À Dieu seul la gloire : Romains 11.33-36, Apocalypse 4.9-11
[i] Voir http://larevuereformee.net/articlerr/n203/le-culte-personnel-selon-martin-luther, texte inspiré du Covenant Companion (15/10/75).
[ii] Luther, Martin Lettre à mon barbier. Une manière simple de prier – www.blfeditions.com
Dominique Ourlin est pasteur au Québec depuis plus de 18 ans, avec son épouse Candy. Il est aussi auteur de deux livres, disponibles sur PainSurLesEaux.com.
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