Sur mes gardes
Apprendre à faire confiance quand on a vécu l’abus.
Par Tiffany Stuart
« Excuse-moi, mais je me change », ai-je dit en refermant la porte à la figure de mon mari.
« Ah oui, c’est vrai : je n’ai pas la permission de te regarder », a répondu Derek de façon sarcastique en s’éloignant.
Pendant des années, je me suis changée dans notre penderie. Je ne supportais pas d’être exposée aux regards – physiquement comme émotionnellement.
Si Derek voyait mon cœur défiguré, me quitterait-il ? Pourrait-il encore me regarder avec amour ?
Derek connaissait mon passé : abus sexuel pendant l’enfance. Avortement. Mais il ne savait pas que ces souvenirs m’affectaient encore. J’avais raconté ces expériences sans une goutte d’émotion.
Ce type de comportement, c’était tout à fait moi : une vraie pro de la dissimulation.
Quand j’avais besoin de pleurer, au lieu d’être honnête avec moi-même et avec mon mari, je piquais une crise. Si Derek me parlait de nos finances ou de la façon dont je faisais sécher les vêtements, je réagissais au quart de tour. Me mettre en colère était plus facile que de me montrer vulnérable.
Après des années d’un mariage médiocre, Derek et moi avons enfin demandé l’aide d’un conseiller chrétien. Aucun séminaire, livre ou sermon n’avait pu nous aider. Un fossé s’était creusé entre nous. « Je souhaiterais avoir une relation plus profonde avec Derek », ai-je dit à mon conseiller durant une session individuelle. « Vous cherchez plus à vous protéger que ce que vous recherchez l’intimité », m’a-t-il dit. « Vous ne pouvez pas avoir les deux. »
Il n’était pas étonnant que je me sente si seule.
Protéger mon cœur blessé
J’agissais comme si je ne voulais pas ou n’avais pas besoin de l’affection de Derek ou de relations sexuelles. Je dormais sur le bord de notre matelas et donnais des caresses sans vie. Quand Derek m’appelait du travail, je la jouais cool. Cependant, au plus profond de moi, je souffrais de ne pas pouvoir lui dire : « J’ai besoin de toi. Je regrette d’être si froide. Je sais que c’est un problème, mais je ne sais pas comment faire autrement. »
Parler honnêtement avec Derek me terrifiait. Je n’arrivais ni à lui dire des mots d’encouragement ni à lui partager ce dont j’avais besoin. Le chant d’amour qui habitait mon cœur pour lui restait silencieux.
Mon langage corporel distant disait à Derek que j’étais en colère et que je n’étais pas heureuse. Il ne savait pas quoi faire. Quand il me montrait de l’attention, je réagissais avec indifférence. Notre conseiller a alors dit à Derek : « Tiffany va essayer de vous résister jusqu’au bout. Mais n’arrêtez pas d’essayer de l’aimer. »
Vous vivez peut-être une situation semblable avec votre conjoint. Si l’un de vous a subi un abus dans le passé, l’intimité peut se révéler difficile à cultiver. Mais il y a de l’espoir. Pour moi, il a fallu un conseiller chrétien, des camions de larmes et de prières – et un retour douloureux sur mon passé. J’ai dû pardonner à mes agresseurs et accepter le pardon de Dieu afin d’être en mesure de donner et recevoir de l’amour.
Apprendre à faire confiance
L’écrivain Walter Anderson a dit un jour : « Nous ne sommes jamais aussi vulnérables que lorsque nous faisons confiance à quelqu’un, mais, paradoxalement, si nous ne pouvons pas faire confiance, nous ne pouvons pas non plus trouver amour et joie. »
Ma délivrance est venue quand j’ai accepté de baisser la garde. Un ami m’a encouragée à écrire le mot bienveillance dans mon journal, dans ma Bible et sur mon miroir, pour me rappeler que Derek n’était pas un autre prédateur. Qu’il était mon mari plein de bienveillance ! Qu’il était pour moi – non contre moi !
Pour faire confiance, il fallait que je commence à partager ma vie quotidienne avec Derek. J’ai donc commencé à lui dire quand j’avais eu une conversation difficile avec une amie ou quand j’avais eu du plaisir à écrire ou à faire des achats. Et il m’a écouté. Au début, j’avais peur que Derek me juge. Je voulais m’enfuir, me cacher, mais j’ai choisi de rester ouverte. Ma plus grande peur – que Derek me rejette – n’est jamais arrivée. Avec le temps, Derek s’est rapproché et m’a posé plus de questions. Je me suis sentie aimée.
Ma décision de faire confiance a apporté une nouvelle intimité dans notre mariage. Parce que je crois que l’amour de Derek est sincère, je ne pense plus qu’il me rejette quand nous ne sommes pas d’accord. Les conflits suivis de saines résolutions ont permis une compréhension plus profonde entre nous.
Et par-dessus tout, j’ai appris à faire confiance à Dieu. Quelles que soient mes circonstances, Dieu est présent. Il travaille continuellement au sein de mon mariage.
Est-ce que je me dévoile complètement à Derek en tout temps ? Non, mais je suis plus ouverte que jamais auparavant. Je me rappelle constamment de faire confiance à Dieu et à Derek lorsque je partage mes secrets, mes peurs et mes rêves. Je dois lutter contre mon ancien instinct d’autoprotection.
Être vulnérable est risqué, mais c’est ainsi que j’apprends à vivre l’amour véritable au sein de mon couple et avec mon Dieu.
Tiffany Stuart écrit sur la foi et la famille depuis la maison.
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