La paternité des temps modernes
Écrit par Jim Daly
À la fin de l’année 1999, ma femme Jeanne et moi avons appris que nous attendions notre premier enfant. Cette nouvelle est tombée à un moment particulièrement stressant dans ma carrière et je pense que je n’ai pas vraiment mesuré ce que cela signifiait. Je ne me sentais absolument pas encore père et ce rôle me semblait abstrait et théorique.
Quelques mois plus tard, les choses sont devenues un peu plus réelles. Jeanne était en salle d’accouchement depuis 27 heures. Le pronostic vital du bébé était inquiétant. Les docteurs, qui commençaient à se préparer à faire une césarienne, ont donné à Jeanne une dernière chance et dans un ultime effort, elle a réussi à pousser elle-même Trent jusque dans ce monde. Les infirmières nous l’ont apporté, tout propre et emmailloté. Après que Jeanne se soit endormie, j’ai pris Trent dans mes bras et suis resté assis avec lui sur le fauteuil à bascule tout au long de cette première nuit.
Je suis papa, me suis-je dit en moi-même. C’est comme si je prenais conscience, pour la première fois, de la réalité de la paternité. Et ça m’a fait peur. En grandissant, je n’avais jamais eu de père fiable sur lequel je puisse compter. Aujourd’hui encore, j’ai le cœur serré en pensant à tous ces moments où j’avais besoin d’un père, mais qu’il n’était pas là.
Je priais tout en berçant mon fils Trent. Et je lui murmurais : J’espère que je serai un bon père pour toi, le père que je n’ai jamais eu.
Un monde qui change
L’auteur Kent Nerburn a écrit ceci : « Il est bien plus facile de devenir père que d’être père. » C’est vrai. Même pour les hommes qui aspirent vraiment à ce rôle, ça reste intimidant. Maîtriser un sport ou une carrière, c’est possible. Mais quand il s’agit de la paternité, il est difficile de contrôler quoi que ce soit. Quand notre bébé se met à hurler, on ne peut plus l’arrêter. Quand notre fils échoue à son examen de mathématiques, il n’est pas de notre pouvoir de le faire réussir. Être père, c’est un travail sur le très long terme.
Qu’est-ce que cela signifie d’être père aujourd’hui ? De nos jours, la famille « traditionnelle » est bien différente de ce qu’elle était dans les générations précédentes. Le rôle traditionnel du père comme étant celui qui pourvoit et qui protège a grandement changé. Souvent, les deux parents travaillent à l’extérieur de la maison. Nous faisons désormais face à des nouvelles formes de dangers : les attaques subtiles et insidieuses d’une culture hostile aux familles. Au sein du foyer, la présence d’une mère pour prendre soin des enfants et les élever est toujours aussi nécessaire ; mais en parallèle, les tâches autrefois réservées au père ont changé. Sa mission de pourvoir aux besoins de la famille a été répartie entre les deux parents. Son rôle de protecteur est devenu de moins en moins évident.
Aujourd’hui, on attend des pères qu’ils soient bien plus impliqués. Alors que de plus en plus de mamans contribuent aux revenus du foyer, on attend des pères qu’ils s’occupent plus des enfants. Nous changeons désormais les couches, nous cuisinons et faisons des bisous magiques sur les petits bobos. Et c’est super. En tant que père, nous devrions nous réjouir de cette possibilité d’avoir un plus grand rôle dans l’éducation de nos enfants. Mais souvent, la paternité des temps modernes ne semble pas correspondre à ce que nous pensons être. Pourtant, Dieu est toujours à l’œuvre, nous poussant à dépasser nos penchants primitifs et nous aidant à nous rapprocher toujours plus de lui selon son plan. Notre chair et nos peurs peuvent essayer de nous ralentir, mais notre Seigneur nous donne « un esprit de force, d’amour et de sagesse » (2 Timothée 1.7).
L’amour d’un père
L’amour, c’est la clé. Si vous aimez vos enfants et le leur montrez, tout le reste se développe naturellement.
Nous considérons souvent que la mère est le cœur du foyer. Mais le père a un rôle tout aussi essentiel à jouer dans la vie de ses enfants, au-delà du seul fait d’assumer le rôle de meneur. J’ai en tête l’image de l’arbre grand et massif planté dans mon jardin, derrière la maison. Un vieux chêne qui étend ses branches vers le ciel comme s’il ouvrait les bras. Un endroit auprès duquel les enfants courent dès le matin pour s’amuser et au pied duquel ils s’assoient pour trouver du réconfort.
Sommes-nous capables de construire ce même sentiment de sécurité inébranlable ? Pouvons-nous être ce père qui dit à ses enfants : « Viens, viens t’asseoir sur mes genoux. Qu’est-ce que tu as fait aujourd’hui ? Est-ce que tu as fait une erreur ? Qu’est-ce que tu as appris ? » Cela reflète la façon dont je vois notre Père Céleste. Quelqu’un toujours prêt à partager un fou rire ou à verser une larme. Ce Père peut être ferme, oui, mais toujours dans l’amour. Des conséquences et une correction peuvent survenir, mais il ne condamne jamais. Ses enfants se sentent en sécurité.
Être père, c’est passer du temps avec ses enfants, parler et jouer avec eux, les porter quand ils ont besoin d’être portés. C’est s’efforcer d’être présent, de ne pas se réfugier dans sa bulle ou de fuir dans le travail. Ces diversions ne durent pas et sont insignifiantes comparées à notre relation avec nos enfants.
La puissance d’un père
Être un papa sûr et accueillant, ça ne sonne pas très héroïque. Jouer à la poupée avec notre fille ne nous paraît pas très viril. Mais la Parole nous dit explicitement que l’amour, secret de la paternité, est lié au sacrifice. Il « supporte tout » et « endure tout » (1 Corinthiens 13.7).
Être un homme se résume-t-il à faire preuve d’un pouvoir et d’une force brute ? Ou est-ce que c’est pouvoir dire : « je vais donner ma vie » ? « Se sacrifier », ça peut nous sembler être une preuve de faiblesse et d’impuissance, mais comme l’a montré Christ, le sacrifice est puissant. C’est quand nous nous sacrifions pour nos familles que nous sommes les plus forts, même si c’est dans de petits gestes. Peut-être même surtout dans les petits gestes, parce que ce sont souvent eux les sacrifices les plus difficiles à faire.
Les hommes des familles en bonne santé ont une caractéristique en commun : ils se sacrifient. Ces hommes passent du temps avec leurs enfants même quand ils aimeraient mieux faire autre chose. Ils discutent avec leurs enfants même si une partie d’eux-mêmes voudraient juste regarder le match de football. Ils réagissent avec patience quand leur enfant renverse un verre de lait sur le sol pour la énième fois.
On n’y arrivera pas à chaque fois. Mais il nous faut constamment nous mettre au défi de ne pas seulement dire à nos enfants que nous les aimons, mais aussi de leur montrer en actes combien ils sont importants pour nous. Cela peut parfois nous mener à faire des choix radicaux. Mais être papa a toujours été une expérience plutôt extrême.
L’instruction d’un père
Mes fils, Trent et Troy, entrent dans l’adolescence, une nouvelle étape de croissance et d’apprentissage. Et je crois que mon rôle en tant qu’éducateur est désormais plus important. Au cours des dernières années, Jeanne a été au centre de notre famille, élevant et instruisant nos garçons selon leurs besoins. J’ai aidé à renforcer ces leçons et j’en ai enseigné moi-même quelques-unes. Jeanne s’est assurée que nos enfants aient les meilleures fondations possibles, mais à mesure qu’ils grandissent, mon rôle devient de plus en plus important. Je ressens désormais cette responsabilité de manière très forte. C’est à moi d’instruire mes garçons et de leur dire ce que cela veut dire d’être un homme. Ce que cela signifie d’être adulte, de trouver son propre chemin et de continuer à suivre Dieu.
Si maman fabrique le bateau, c’est en tous cas papa qui hisse le voile. Nous aidons nos enfants à prendre le large, nous leur expliquons comment naviguer et, quand ils sont prêts, nous les aidons à s’élancer vers le soleil levant.
Jim Daly est le président de Focus on the Family. Il a écrit sur la persévérance en Dieu dans son livre Stronger. Vous pouvez suivre son blogue en anglais sur JimDaly.FocusOnTheFamily.com.
Cet article a été publié dans le numéro d’été 2014 du magazine Thriving Family. Il a été en partie adapté du livre The Good Dad: Becoming The Father You Were Meant to Be, par Jim Daly. Tous droits réservés © 2010 Focus on the Family. Utilisation autorisée.