Ce merveilleux désordre
Écrit par Candice Watters
C’était enfin l’heure de la sieste ! Bon, certes, je m’étais à peine attaquée au bazar du matin (incluant la vaisselle du déjeuner, celle du dîner et quelques plats qui trempaient depuis la veille), mais j’étais enceinte de plus de 7 mois de mon troisième enfant… J’avais désespérément besoin d’une bonne sieste.
Heureusement, mon petit bonhomme de 4 ans s’est endormi sans faire d’histoire. Quant à mon grand de 6 ans, il ne demandait qu’à passer du temps à jouer tranquillement seul. Je l’ai donc laissé au salon avec ses Legos, ses livres et ses crayons de couleur. Tout était parfait.
Une heure plus tard, j’ai été réveillée par un chuchotement insistant à mon oreille : « Maman, viens voir ce que j’ai fait. »
Je me suis extraite de mon lit alors que mon fils me tirait par la main pour me mener jusqu’à son chef-d’œuvre. Au pied de l’escalier, le sol du salon était complètement recouvert par les coussins du canapé, la belle couverture en laine et les draps que je venais de laver.
« Tu ne le trouves pas génial ? C’est mon château fort ! »
« Chéri, c’est vraiment super. » Ai-je péniblement réussi à répondre. « Mais tu te souviens qu’on a des invités ce soir et que maman vient de faire le ménage. Il faut que tu ranges tout ça. »
Il m’a regardé avec ses yeux de chien battu et m’a lancé : « On dirait que pour toi, le canapé est plus important que moi. »
« Non, bien sûr que non ! » ai-je soupiré, sachant qu’il ne comprendrait pas mon dilemme. J’étais très fière de son esprit créatif. Mais fallait-il vraiment qu’il s’exprime aux dépens de mon bel intérieur que je mettais tant d’efforts à garder rangé ?
Qu’est-ce qui compte le plus ?
Comment aurions-nous pu savoir, avec mon mari, alors que j’étais enceinte de mon petit constructeur de châteaux forts, que ce qui définissait en fait un bon canapé n’était ni sa solidité, ni son niveau de confort et encore moins sa couleur assortie au tapis ?
Ce qui comptait le plus, une fois les enfants nés, c’était la facilité avec laquelle on pouvait en retirer les coussins pour le transformer en bateau de pirate, en volcan ou en cachette secrète. Au moins, nous avions eu la prévoyance de lui faire subir un traitement antitache.
Nous étions tellement naïfs, perdus dans le flot des magazines de décoration. Nous rêvions d’une maison au décor parfait de catalogue où chaque meuble, chaque bibelot est à sa place. Le seul problème avec ce fantasme, ce sont les gens. Avez-vous déjà remarqué qu’il n’y en a presque jamais dans les catalogues d’ameublement ? Si ce n’est un chien par-ci par-là, ou une serviette brodée qui suggère une présence humaine, ces catalogues sont souvent vides de toute vie. Mais pourtant le plus important, n’est-ce pas les gens ?
Le vrai but d’une maison
Dans Home Comforts, un livre qui parle de la gestion d’une maison plutôt que de son esthétique, l’auteure Cheryl Mendelson écrit : « Quand vous gérez une maison, vous utilisez votre tête, votre cœur et vos mains pour en faire un foyer, le lieu où vous vivez les moments les plus importants de votre vie personnelle. » Et quand vos enfants sont petits, ces moments importants ont souvent tendance à être source de désordre.
Stephen Curtis Chapman fait très bien passer cette idée dans sa chanson Signs of Life [Signes de vie] :
Des crayons de couleur roulent sous le siège de ma voiture,
Des vélos jonchent l’allée de ma maison, des balles et des battes trainent dans mon jardin,
Et une créature en plastique venue de l’espace est installée sur ma chaise.
Les signes de vie sont partout.
Des trésors éternels
Parfois, quand mon mari se plaint que la pelouse a encore été piétinée par les jeux des enfants, je lui rappelle : « Chéri, on élève des enfants, pas une pelouse. » Et récemment, il m’a lui-même retourné la remarque en me lançant : « Chérie, on élève des enfants, pas des tables basses et des poufs en cuir. »
Ces choses ne sont pas éternelles. Peu importe le bon état d’un objet quand vous l’achetez, ou ce que vous faites pour qu’il reste dans cet état, ça ne durera pas. Aussi frustrant que cela puisse paraitre, c’est en fait très libérateur de l’accepter. Une auteure, parlant de sa vie de mère, écrit qu’elle sait très bien que ses affaires finiront par être abimées tôt ou tard, alors elle les regarde en se disant : C’est déjà cassé. Cela lui évite le stress de vouloir à tout prix que tout reste parfait.
Pour moi, il devient normal de regarder nos affaires et de penser : C’est déjà collant ou taché. Le fait de ne plus chercher à ce que tout autour de moi reste immaculé va dans le sens de ce que dit Jésus en Matthieu 6.19 : « Ne vous amassez pas des trésors sur la terre, où les mites et la rouille détruisent et où les voleurs percent les murs pour voler. »
Mes objectifs pour notre maison n’incluent plus d’y maintenir une apparence de magazine de déco. Notre foyer n’a pas pour vocation d’être une vitrine. La vie qui se déroule entre ses murs – aimer un mari et des enfants, avoir des bébés, enseigner aux enfants à connaitre et à aimer leur Dieu – est bien trop importante pour qu’elle passe après des buts superficiels… même si cela signifie que je dois me frayer un passage au milieu d’un château fort pour pouvoir terminer ma sieste.
Candice Watters est la fondatrice d’un site Web de Focus on the Family à l’intention des jeunes adultes (en anglais) : www.Boundless.org Elle est aussi mère de trois enfants.
Cet article a été publié sur le site FocusOnTheFamily.ca sous le titre This beautiful mess. Tous droits réservés © 2007 par Focus on the Family. Utilisation autorisée.