Cultiver l’empathie et l’altruisme chez votre enfant

Apprendre à votre enfant comment interagir émotionnellement avec les autres et à proposer son aide

Écrit par Dr John Trent

Qui n’a pas envie que son enfant fasse preuve d’empathie et d’altruisme envers les autres plutôt que d’être de ceux qui croient que le monde tourne autour d’eux ? Mais est-il encore possible d’enseigner l’empathie à nos enfants dans un monde où règne le narcissisme ?

D’abord, il ne faut pas croire ce que racontent les médias sur les nouvelles générations – les milléniaux et la génération Z – en disant que ce sont les générations les plus égoïstes de tous les temps. Plusieurs études scientifiques démontrent que cela est faux. Certaines des personnes les plus attentionnées et engagées qui veulent faire une différence dans la vie des gens sont en fait ces jeunes qui sont critiqués par les médias. Mais comment pouvez-vous transmettre ce désir de prendre soin des autres à votre précieuse progéniture ?

Deuxièmement, remarquez les deux mots clés dans le titre de cet article : empathie et altruisme. L’empathie est le sentiment de compassion que nous ressentons lorsque nous voyons une personne ou un animal souffrir ou être maltraité. L’altruisme, c’est quand nous voyons une personne en détresse faire tomber ce qu’elle avait dans les bras et que nous nous penchons pour l’aider à ramasser. Nous voulons que nos enfants ressentent de la compassion et qu’ils aient le courage de prendre les devants pour aider les autres.

Nous sommes conçus pour faire preuve d’empathie

Les spécialistes en neurosciences ont démontré que dès l’âge de huit mois, les enfants peuvent réagir aux pleurs ou aux plaintes d’autres enfants. Votre bambin arrive au monde avec cette capacité accordée par Dieu de voir la détresse des autres et de vouloir y répondre. En tant que parent, il y a des choses essentielles que nous pouvons faire pour développer l’empathie et l’altruisme chez nos enfants. En les encourageant et en les guidant, nous pouvons aider nos enfants à choisir de tendre la main aux autres et de les aider de manière constante.

Dans cet article, nous allons explorer six voies pour aider votre enfant à fortifier ses muscles émotionnels et à devenir plus empathique et altruiste. Ces six méthodes s’appuient sur le fait que votre enfant soit ancré dans un sentiment d’indépendance stable. Cela signifie que lorsqu’il voit quelqu’un souffrir, parce qu’il se sent lui-même en sécurité intérieurement, il n’est pas débordé par les manifestations émotionnelles de l’autre.

La base d’une telle sécurité se trouve dans son attachement à vous, ses parents. Plus votre enfant est attaché à vous de manière stable, plus il lui sera facile d’explorer le monde avec confiance et d’aller vers les autres, même ceux qui souffrent. Mais votre enfant a aussi besoin que quelqu’un lui montre à quoi ressemble l’affection. Bien que nos enfants soient faits pour manifester une réaction d’empathie, ce lien essentiel – le moment où ils peuvent aller au-delà d’une réaction émotionnelle et répondre au besoin de l’autre – se solidifie lorsqu’ils voient de l’empathie transformée en altruisme.

Alors, allons explorer les six manières dont nous pouvons aider nos enfants à devenir suffisamment indépendants pour voir ce qui arrive aux autres et pouvoir réagir en cherchant à aider.

  1. Aidez d’abord votre enfant à comprendre ses propres émotions

Combien de fois avez-vous entendu en prenant l’avion : « enfilez d’abord votre masque à oxygène avant d’aider vos enfants à mettre les leurs. » Ce genre de conseil peut vous aider à enseigner l’empathie à vos enfants. Il faut que vous appreniez à vos enfants comment gérer d’abord leurs propres émotions. S’ils comprennent leurs émotions, ils sauront réagir à celles des autres.

Deux filles différentes

Par exemple, ma femme et moi avons élevé deux filles très différentes. Kari avait une manière très expressive de montrer ses émotions quand elle était petite. On n’avait jamais besoin de se demander ce qu’elle ressentait. Si elle était contrariée, nous le savions, mais il arrivait que son expressivité déborde un peu de côté du caprice ou de la crise de colère. Il y a une chose qui nous a beaucoup aidés Kari et nous : nous lui avons fourni des moyens de visualiser ses émotions et lui avons montré qu’elle pouvait trouver des manières saines de les gérer.

L’image du micro-ondes

Kari avait cinq ans et elle venait de faire une crise alors qu’on lui avait pris un jouet. Lorsque son émotion s’est un peu dissipée, je l’ai emmenée dans la cuisine.

« Kari, faisons une expérience. » Je lui ai demandé de sortir une tasse en verre transparent du placard et de la remplir d’eau. Ensuite, nous l’avons placée dans le micro-ondes et fait chauffer pendant quatre minutes. Dans un micro-ondes, il faut environ deux minutes trente pour que l’eau commence à bouillir.

« Tu vois ces bulles ? Cela veut dire que l’eau bout. Réfléchis aux moments où tu te sens contrariée. As-tu parfois l’impression que tes émotions se mettent à bouillonner et menacent de déborder ? » lui ai-je demandé.

Elle a hoché la tête.

« Alors, aide-moi un peu, on va faire quelque chose. » Je lui ai demandé de mettre le micro-ondes sur pause. Les bulles se sont immédiatement arrêtées. Puis elle l’a remis en marche et l’eau a recommencé à bouillir. Elle a fait cela plusieurs fois.

« Kari, lorsque tu ressens toutes ces émotions qui se bousculent en toi, tu peux appuyer sur pause pour éviter que cela ne déborde. » Cela nous a fourni l’une des images les plus utiles que nous avons pu utiliser à de nombreuses reprises avec elle. Kari a pu comprendre comment ces bulles d’émotions – la frustration, la colère, la peur – peuvent s’accumuler en elle, mais elle a aussi vu qu’elle avait la possibilité d’appuyer sur pause et d’éviter que tout cela déborde.

Mettre des mots sur les émotions

Laura, notre seconde fille, avait elle aussi des émotions profondes, mais on ne les voyait que très peu. Elle avait tendance à les internaliser, à se détourner de nous et à vouloir être seule plutôt que de partager ce qu’elle ressentait. Alors notre stratégie avec elle était de l’encourager à mettre des mots sur son ressenti. On lui demandait : « Quel mot représente ce que tu ressens en ce moment ? » Si l’on prenait le temps de s’arrêter et d’écouter, elle finissait par trouver le mot correspondant à son émotion qu’elle n’arrivait pas auparavant à nommer ou à partager. Cela lui a permis d’apprendre à parler de ses émotions plutôt que de se contenter de les ignorer ou de les cacher.

Aidez vos enfants à comprendre leurs propres émotions

Commencez par aider vos enfants à gérer leurs émotions. Lorsqu’ils deviendront un peu plus autonomes et qu’ils réaliseront qu’ils peuvent gérer leurs peurs ou leurs frustrations, cela pourra les aider à percevoir les émotions des autres avec un regard plus objectif. Ils commenceront à voir le besoin qui se cache derrière les actes.

Par exemple, imaginons que votre fils de dix ans ait un ami qu’on appellera Bryan. Son père est un militaire qui vient d’être envoyé en Afghanistan. Il est normal que Bryan soit attristé par l’absence de son père. Ce pourrait être un bon moment pour discuter avec votre enfant. Demandez-lui : « Comment penses-tu que Bryan se sent en ce moment ? Pourquoi crois-tu qu’il pourrait être triste ? »

Aidez votre enfant à chercher ce qu’il ressentirait lui-même s’il était dans la même situation. C’est une manière de l’aider à développer de l’empathie pour son ami. Mais on peut aussi lui demander : « Qu’est-ce que tu penses qu’on pourrait faire pour aider Bryan en ce moment ? » Encouragez votre enfant à réfléchir à différentes manières d’aider son ami durant l’absence de son père.

  1. Faites de votre enfant un héros plein de compassion dans un livre que vous lui lisez

Pour donner des modèles de compassion à nos filles, nous avons choisi une voie que nous vous encourageons aussi à suivre : faire de votre enfant un héros plein de compassion ! Lorsque Kari et Laura avaient environ sept ou huit ans, le soir au coucher, nous leur lisions l’extraordinaire série de livres de C. S. Lewis, Le Monde de Narnia.

Dans Le Lion, la Sorcière Blanche et l’Armoire magique, le lecteur rencontre ce merveilleux personnage nommé Lucy. C’est une personne empathique et altruiste, aimante et pleine de bonté. Mais lorsque nous lisions le livre avec nos filles, elle ne s’appelait plus « Lucy ». Elle se transformait en « Kari » ou « Laura ». Mille excuses à C. S. Lewis, nous avons remplacé le nom de l’héroïne par celui de nos filles.

Chaque fois que Lucy apparaissait dans l’histoire, c’était alors Kari qui rencontrait M. Castor et l’aidait. Ou c’était Laura qui faisait preuve d’une telle compassion envers M. Tumnus lorsque la sorcière l’avait transformé en pierre. Et ce sont princesse Kari et princesse Laura qui sont devenues princesses de Narnia en se montrant si attentionnées et gentilles. En prêtant à votre enfant les traits d’un personnage particulièrement empathique et altruiste, cela peut leur donner un excellent modèle pour ce qu’ils auront envie de devenir dans la vie réelle !

  1. Aidez votre enfant à comprendre ce qui est réel pour l’autre

Je n’ai pas toujours été le meilleur en ce qui concerne l’empathie et la compassion. Mais j’ai appris quelque chose d’important au sujet de ces deux qualités quand j’étais adolescent. C’est une leçon qu’apprennent tous ceux qui font l’école de soins infirmiers : « la douleur se mesure selon les dires du patient. » Si le patient estime que sa souffrance est réelle, elle est réelle pour lui, même si l’infirmière ne trouve rien pour l’expliquer. Voilà en quoi le fait de garder cela en tête peut vous aider à enseigner l’empathie et l’altruisme à votre enfant.

Une leçon sportive et artistique

Lorsque j’étais en première année de secondaire, notre équipe de football américain a participé aux éliminatoires de notre division. Nous étions les favoris et je me rappelle avoir mis tout mon cœur dans le jeu. Malgré tout, notre équipe a perdu dans les dernières secondes du match. Je n’ai pas retiré mon casque pendant un long moment parce que je pleurais. Je ne voulais pas que mes amis me voient en larmes parce que j’avais vraiment le cœur brisé.

Quelques semaines après le match, j’étais dans les coulisses pendant les auditions pour la pièce de l’école. Un bon ami à moi devait passer des essais. Il ne jouait pas au football, mais c’était un excellent chanteur et il aimait beaucoup le théâtre. J’étais venu le soutenir. Malheureusement, il a complètement raté son audition. Il a obtenu un rôle dans la pièce, mais n’a pas été choisi pour interpréter le personnage principal, rôle pour lequel il avait travaillé si dur.

Lorsqu’il est sorti de scène, j’ai vu qu’il avait les larmes aux yeux, comme moi lors de ma défaite en sport ! Pour être parfaitement honnête, je ne trouvais pas cela si grave d’avoir raté une audition pour la pièce de l’école, mais les pleurs de mon ami m’ont appris que cette pièce avait pour lui la même valeur que les éliminatoires pour moi et qu’il avait perdu. J’ai raconté cette histoire à mes filles quand elles étaient petites. Cela les a aidées à comprendre que la douleur est différente pour chacun, mais qu’elle est tout aussi réelle.

Cherchez des moyens d’aider vos enfants à comprendre que même si pour eux, perdre une peluche n’est pas la fin du monde, cela peut l’être pour leur ami ou leur frère. C’est quelque chose qu’ils peuvent apprendre à reconnaitre et à prendre en compte.

  1. Encouragez la créativité dans les manières d’aider les autres

Pour que les enfants développent leur empathie et leur altruisme, c’est une bonne chose qu’ils voient d’autres personnes faire preuve d’empathie. Cela peut être particulièrement efficace de voir des enfants comme eux s’occuper des autres.

Easton LaChappelle avait quatorze ans lorsqu’il a construit le prototype d’une main robotisée en se servant de Lego et de fil de pêche pour son cours de science. Elle était tellement bien construite qu’il a remporté la troisième place à la foire des sciences du Colorado en 2011. C’est là qu’il a rencontré une petite fille âgée de sept ans qui était équipée d’une prothèse de bras. C’était une prothèse dernier cri, mais elle avait coûté plus de 80 000 dollars. C’était bien trop cher pour la plupart des familles ordinaires. C’est là qu’Easton a décidé de se montrer créatif. Il a cherché un moyen de fabriquer une prothèse similaire pour un prix bien plus raisonnable. Avec l’aide d’une imprimante 3D, il a pu en produire une qui ne coûtait que 350 dollars.

Il existe de nombreuses histoires d’enfants qui ont fait une différence autour d’eux et dans le monde. Pour en trouver d’autres, vous pouvez effectuer des recherches sur internet et partager ces histoires avec vos enfants. Parlez avec eux de la créativité de ce jeune homme et encouragez-les à faire preuve de créativité pour aider les autres. Demandez-leur : « Que pourrions-nous faire pour aider cette personne ? » C’est une bonne manière de les pousser à être à la fois créatifs et attentifs aux autres.

  1. Aidez vos enfants à comprendre que leur propre douleur peut devenir un outil pour encourager les autres

Le Roméo de Shakespeare clame : « Celui-là rit des cicatrices, qui n’a jamais ressenti la douleur d’une blessure. » Il est facile de se moquer de la cicatrice que l’on voit sur quelqu’un d’autre. Mais on la regarde très différemment si nous-mêmes avons déjà été blessés. Tous les enfants traversent des moments difficiles. Mais ces expériences négatives ne doivent pas obligatoirement nous abattre. Elles peuvent nous rendre plus attentifs, plus conscients et même mieux préparés à aider les autres lorsqu’ils font face à des défis similaires.

Votre enfant échouera à entrer dans une équipe, il perdra quelque chose qu’il aime ou tombera malade et ratera un évènement important. Soyez à ces côtés quand il vit ces déceptions. Après avoir laissé passer un peu de temps, cherchez des occasions de parler de ce qu’il a traversé. Discutez des blessures qui ont laissé des cicatrices, et du fait qu’il a travaillé dur pour les surmonter. Par exemple, imaginons que votre famille ait déménagé à l’autre bout du pays quand votre enfant était un préadolescent. Il a vécu de nombreux défis pour s’adapter à cette nouvelle vie. Mais plus tard, lorsqu’il rencontre quelqu’un qui arrive d’un autre endroit et ne connait personne, il peut se servir de son expérience pour accompagner le nouveau venu.

Un de nos amis proches est mort l’année dernière dans un accident d’escalade. Il a laissé derrière lui une femme et des jumeaux. Le Seigneur a permis que le nouveau professeur arrivé à l’école des jumeaux ait perdu son propre père à peu près au même âge qu’eux. Le lien qu’ils ont pu créer avec lui et ses encouragements ont été incroyablement utile pour notre amie et ses garçons.

  1. Avoir le courage de faire preuve de compassion

Il y a tant d’autres manières dont on peut encourager l’empathie et l’altruisme. Des études scientifiques prouvent à quel point elles peuvent être importantes pour les enfants à tous les âges. Par exemple, avoir un animal de compagnie dont l’enfant doit prendre soin, partir en voyage missionnaire, participer à des distributions de nourriture ou rendre visite à des personnes âgées dans une maison de retraite peuvent aider à enseigner l’empathie à nos enfants. Vous l’avez probablement deviné, mais le prédicteur le plus puissant qui ressort dans les études pour savoir si un enfant va développer des comportements empathiques et courageux, c’est le fait de grandir dans une famille qui place en priorité la compassion et le soin envers les autres. Voici un exemple formidable :

Pearl et Samuel Oliner ont mené une étude marquante sur le fait que les enfants qui avaient des parents dotés de compassion avaient tendance à être eux aussi plus empathiques et altruistes. Les Oliner avaient choisi d’étudier les Allemands qui avaient aidé à sauver des Juifs pendant l’holocauste nazi. Ces personnes avaient choisi d’aider les autres malgré le risque considérable de perdre leur propre vie.

Les personnes leur ont toutes rapporté qu’elles avaient puisé leur force dans leurs souvenirs de leurs parents qui avaient choisi d’être courageux et bienveillants. Avec leur famille, il avait véritablement expérimenté les versets tels que celui en Ésaïe 1.17 : « Apprenez à faire le bien, recherchez la justice, protégez l’opprimé, faites droit à l’orphelin, défendez la veuve ! »

Je prie pour que nous ne nous retrouvions jamais dans le genre de situation qui a poussé ces Allemands à faire preuve d’autant de courage et de compassion, mais nous sommes tous parfois confrontés à des choix qui exigent du courage. Ces décisions peuvent faire une différence dans la manière dont nos enfants voient les autres. Leurs souvenirs de ce qu’ils nous ont vus faire pour rétablir la justice, nous montrer miséricordieux, empathiques et altruistes pourront avoir un impact sur le reste de leur vie.

Une dernière pensée

Il est possible d’enseigner à nos enfants comment faire preuve d’empathie et d’altruisme, même dans le monde actuel. Nous voulons que nos enfants soient remplis de compassion et qu’ils aient le courage et le désir de tendre la main à ceux qui en ont besoin. Si nous faisons nous-mêmes preuve de ces qualités, nos enfants le remarqueront et ils apprendront en nous regardant.

 

Le Dr John Trent est auteur, orateur et président de Strong Families, un organisme qui se donne pour mission de renforcer les liens familiaux.  

© 2024 John Trent et Focus on the Family. Tous droits réservés. Utilisation autorisée. Publié pour la première sur FocusOnTheFamily.com.