Aider nos enfants à surmonter les difficultés

Écrit par Catherine Wilson

 

En tant que parents, on est souvent marqués par cette scène terrible : notre enfant en sanglots, après avoir vécu une profonde déception. Nous sommes tous passés par là. Peut-être qu’il a été rejeté par son meilleur ami, ou qu’il a reçu une mauvaise note inattendue. Les joies de l’enfance sont entrecoupées de toutes sortes de raisons de pleurer. Nous ne pouvons pas protéger nos enfants de tous les coups durs qui parsèmeront leur chemin, mais nous pouvons leur apprendre comment penser de façon à les traverser de manière constructive.

Martin Seligman, professeur de psychologie à l’Université de Pennsylvanie, souligne que les années d’école primaire sont une fenêtre idéale pour apprendre aux enfants comment bien penser les circonstances et les aider à rebondir avec force quand les épreuves arrivent. « À cet âge, les enfants commencent à réfléchir au fonctionnement du monde, explique Seligman. Ils développent des théories sur ce qu’ils peuvent faire pour transformer leurs échecs en succès, s’ils y peuvent quelque chose. C’est ce qui va étayer leur sens de l’optimisme ou du pessimisme. »

Dans son livre The Optimistic Child (l’Enfant optimiste), Seligman donne aux parents des outils intéressants pour les aider à transmettre de bons schémas de pensée à leurs enfants quand ils rencontrent des difficultés. Il est vrai qu’il s’agit d’une approche séculière. Le livre de Seligman n’est pas chrétien, mais les stratégies qui y sont proposées sont basées sur des recherches solides menées sur les manières d’éviter la dépression chez l’enfant comme chez l’adulte. Cette approche est utile pour enseigner aux enfants à réellement mettre en œuvre ce à quoi nous exhorte Paul en Philippiens 4.8 : fixer nos pensées sur ce qui est vrai, honorable et juste.

 

Les racines de la défaite et de la dépression

Lorsqu’un enfant traverse des événements difficiles, les conclusions qu’il tire à première vue de ces revers sont souvent inexactes et exagérément pessimistes. Et la plupart du temps, avant même que l’enfant comprenne les failles de son raisonnement, il se retrouve envahi par les sentiments décourageants qui découlent de ce raisonnement.

Enseigner à un enfant la résilience et l’optimisme — la capacité à surmonter les moments difficiles — revient à lui apprendre à ralentir ses mécanismes de pensée pour interpréter correctement le problème auquel il fait face. Comme l’explique Seligman : « Vous voulez l’amener à penser le problème sous un angle différent plutôt que de croire les premières pensées qui lui viennent à l’esprit. »

« Lorsqu’un enfant est en échec, écrit-il, il se demande d’abord pourquoi. Et il y a toujours trois éléments dans la réponse qu’il va se forger : qui? De qui est-ce la faute ? Combien de temps cela va-t-il durer ? Et quelle part de sa vie en sera affectée ? »

Selon Seligman, les enfants qui ont du mal à se remettre de leurs épreuves et qui sont plus enclins à la dépression ont tendance à identifier les causes de leurs problèmes comme étant :

  • permanentes (alors que les enfants qui sont résilients et pensent positivement les voient comme temporaires et modifiables) ;
  • globales (affectant de nombreux aspects de leur vie) plutôt que ciblées;
  • exclusivement leur faute et attribuable à des faiblesses personnelles permanentes et globales (plutôt que de considérer que les autres et les circonstances peuvent aussi être responsables).

En général, ils ont tendance à considérer que les causes de leurs problèmes vont persister, vont tout affecter et sont liées à leur caractère déficient. De ce fait, toute difficulté est vue comme insurmontable ou presque.

« Quand l’enfant interprète l’échec de manière pessimiste, cela l’empêche d’essayer, explique Seligman. Cela produit désespoir et passivité face à l’échec, alors qu’une interprétation optimiste permet de voir l’échec plutôt comme un défi à relever, provoquant une réaction par l’action et nourrissant l’espoir. »

Voici quelques exemples pour vous aider à mieux comprendre :

 

Explication permanente ou temporaire :

  • La gardienne s’est énervée contre moi parce qu’elle ne m’aime pas (pessimiste et durable).
  • La gardienne s’est énervée contre moi parce qu’elle est frustrée par mon comportement à l’instant (temporaire).

L’un des éléments qui montrent un processus de pensée négatif est l’utilisation de termes tels que « toujours » et « jamais » alors qu’une personne résiliente ira plutôt vers des mots comme : « aujourd’hui », « ces derniers temps », « parfois ».

 

Explication globale ou ciblée :

  • J’ai été puni parce que je fais toujours tout de travers. Je ne vais même pas demander à mes parents de m’inscrire au sport, là aussi je serais nul (pessimiste et global).
  • J’ai été puni parce que j’ai encore oublié de sortir la poubelle (cause ciblée, sans lien avec d’autres situations).

Les personnes qui ont une manière de penser globale et négative se servent d’expressions comme : « rien ne marche jamais », « personne ne m’aime ». Alors que dans le cas inverse la personne relie le problème à une cause spécifique qu’il peut changer : « sortir la poubelle pourrait m’éviter cette situation déplaisante. » « Alan et Derek ne m’aiment pas » sous-entendu, d’autres personnes peuvent m’aimer.

 

S’accuser soi-même ou regarder aussi les autres et la situation

  • J’ai cassé une assiette. Quel maladroit! À cause de moi, maman est en colère et c’est pour ça qu’elle se dispute de nouveau avec papa. Je ne fais qu’empirer les choses tout le temps. (La faute n’est que sur lui et son caractère.)
  • J’ai cassé une assiette. Je n’ai pas vu le chien arriver dans la cuisine et il m’a fait trébucher. J’aurais aimé éviter que papa et maman se disputent encore. La prochaine fois, je poserai mon assiette sur le comptoir plutôt que de me promener avec (une répartition logique des responsabilités).

Pour terminer sur ce sujet, les enfants pessimistes, qui ont un risque dépressif plus élevé, ont tendance à réagir de façon exactement opposée aux événements positifs. Ils les attribuent à des causes externes, temporaires et spécifiques.

Par exemple, pour expliquer pourquoi son camarade a ri à sa blague, l’enfant pessimiste va plutôt penser que celui-ci était de bonne humeur ce jour-là, et non qu’il est quelqu’un de drôle et d’agréable à fréquenter. Ou il se dira : « J’ai remporté ce concours de musique parce que je sais jouer UN morceau très bien », plutôt que de penser : « Je deviens de plus en plus doué au piano ».

 

Comment aider votre enfant à développer les bons schémas de pensée

Soyez attentif à l’exemple que vous donnez

Si vous reconnaissez certains de ces schémas pessimistes dans votre propre manière de penser, il est important que vous fassiez un effort réel pour montrer à votre enfant une manière plus constructive et porteuse d’espoir d’aborder les difficultés. N’ayez pas peur de verbaliser votre processus de pensée à voix haute, peut-être en l’introduisant par quelque chose qui ressemble à cela :

Avant j’avais l’habitude de voir mes problèmes d’une manière qui me laissait complètement découragé et qui ne m’aidait pas à trouver de bonnes solutions. Maintenant, je me pose ce genre de questions :

Est-ce que c’est toujours et tout le temps, ou juste pour le moment?

Est-ce que ça touche tous les aspects de ma vie, ou juste quelques-uns?

Était-ce juste de ma faute ou y’a-t-il d’autres causes?

Quand je me rappelle de voir les choses comme cela, je me rends compte que…

 

Soyez attentifs à la manière dont vous disciplinez votre enfant

S’il n’est pas sain pour un enfant de prendre l’habitude d’attribuer les difficultés à son caractère ou à ses capacités, vous ne devriez pas non plus tomber dans ce piège. Quand vous corrigez vos enfants, il est important (même dans ce cadre) de le faire à travers un message positif qui met en avant des causes temporaires et ciblées et qui insiste sur le comportement à changer.

Ne dites pas : Arrête ça! Tu es tellement insupportable!

Mais plutôt : Arrête ça! Ça énerve ta sœur quand tu prends la nourriture qui est dans son assiette. Je ne comprends pas pourquoi tu te comportes comme ça aujourd’hui.

On peut même ajouter un commentaire positif sur le caractère de l’enfant, lorsque cela est vrai, par exemple : D’habitude, tu te tiens très bien à table.

 

Prenez l’habitude de parler avec vos enfants de leurs échecs ou difficultés

Votre but est de comprendre et, le cas échéant, de corriger avec douceur les conclusions que votre enfant tire de ses expériences. Vous pouvez lui demander : Quand (tel événement) est arrivé, qu’as-tu pensé? Pourquoi penses-tu que c’est arrivé?

  • Orientez votre enfant pour qu’il réfléchisse à des causes temporaires qu’il peut modifier et non des causes permanentes. Seligman suggère ce type d’approche :

« Parfois on peut avoir l’impression que le problème va durer toujours et qu’on ne peut rien faire pour améliorer les choses. Quand on pense comme ça, ça nous rend tristes et ça nous décourage même d’essayer de régler les choses. Par contre, si l’on se dit que la situation est temporaire et qu’on peut changer quelque chose, on se sentira motivé pour aller de l’avant et faire du mieux qu’on peut. »

  • Aider votre enfant à identifier les comportements ou les causes spécifiques qui sont à l’origine du problème.

 

Réfléchissez avec votre enfant à ses difficultés en vous servant de la métaphore du gâteau

Seligman suggère d’apprendre aux enfants à voir leurs problèmes comme un gâteau constitué de plusieurs parts. Chaque part représente une cause potentielle du problème. Par exemple :

Matthieu et son grand frère Julien se font gronder parce qu’ils se disputaient dans leur chambre et ont renversé du soda sur le tapis. Matthieu écrit sur l’une des parts du gâteau sa première pensée sur les causes de l’incident :

  • Julien pense que je suis un gros bébé. C’est ce qu’il a dit. Et ça me rend triste (pensée pessimiste, cause permanente).

Mais comme c’est une part, cela devient seulement une manière de voir le problème parmi d’autres. La mère de Matthieu l’encourage à réfléchir à d’autres causes possibles. Elle le pousse à se focaliser sur des comportements (qui a fait quoi) qui sont à l’origine du problème et à chercher des causes temporaires sur lesquelles il peut agir.

Après réflexion, Matthieu rajoute trois causes possibles :

  • Je suis rentré dans la chambre alors que Julien voulait être seul et ça l’a énervé. Il n’avait pas dit qu’il voulait être seul alors je pense que ce n’est pas de ma faute, je ne peux pas lire ses pensées.
  • Peut-être que Julien trouve que c’est embêtant de devoir partager sa chambre. Moi aussi je pense souvent ça.
  • Peut-être que Julien est encore fâché de devoir me garder vendredi soir plutôt que d’aller au cinéma avec ses amis.

Matthieu commence à voir au-delà de l’insulte personnelle qui l’a blessé et il repère d’autres explications pour la colère de son frère. Pour certaines d’entre elles, il peut faire quelque chose. Il identifie deux actions qu’il peut mettre en œuvre.

  • Je vais demander à Kyle si je peux dormir chez lui vendredi soir. Comme ça, mon frère pourra aller au cinéma avec ses amis et il verra que je ne suis pas toujours embêtant. Je peux même être gentil.
  • C’est compliqué de partager une chambre. Je vais demander si je peux passer du temps dans la chambre des parents quand on a tous les deux besoin d’être seuls.

 

Soyez attentif aux moments ou votre enfant surdramatise la situation

Si votre enfant à l’habitude de mettre toujours en avant les pires implications concernant ses difficultés, encouragez-le à chercher toujours au moins trois résultats possibles, pas seulement une issue négative.

Amenez-le à se poser les questions suivantes :

– Qu’est-ce qui pourrait arriver de pire?

– Qu’est-ce qui pourrait arriver de mieux?

– Qu’est-ce qui a le plus de chance d’arriver?

Ne vous limitez pas à des spéculations. Encouragez votre enfant à formuler différents plans d’action :

– Que pourrais-je faire pour éviter le pire?

– Que pourrais-je faire pour arriver au meilleur résultat possible?

– Comment puis-je réagir au mieux à cette difficulté?

 

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