Comment préserver votre mariage quand celui de votre enfant se brise

Des idées pratiques pour vous aider à établir des limites saines avec votre enfant adulte  

Écrit par Amy Van Veen

Cela faisait déjà quelques années que John et Joan* avaient remarqué les signes avant-coureurs d’un problème dans le mariage de leur fils. Les éclats de colères s’étaient transformés en silences prolongés, puis, après un certain temps, leur belle-fille avait cessé de venir lors des rassemblements de famille. Pourtant, lorsque leur fils leur a annoncé que lui et sa femme se séparaient, même s’ils avaient vu que les choses n’allaient pas, cela ne leur a pas moins brisé le cœur.

Joan n’avait qu’une envie : intervenir et prendre soin de son fils. Elle voulait le laisser emménager chez eux, leur payer des séances de thérapie de couple, s’occuper de ses petits-enfants et devenir comme leur mère dans ces moments difficiles. De son côté, John voulait faire preuve d’empathie aussi bien envers son fils que sa belle-fille, tout en gardant une certaine distance. De son point de vue, ils avaient fait leur part en élevant leur fils et c’était maintenant à lui de prendre ses responsabilités relativement à ses choix.

« Il y a peu de crises qui bouleversent autant les parents que lorsque leurs enfants ont des difficultés conjugales, » écrit Gary Chapman dans Married and Still in Love (Mariés et toujours amoureux, traduction libre). « Nous connaissons les statistiques désastreuses. Beaucoup d’entre nous ont des frères ou des sœurs qui ont divorcé et se sont remariés, mais quand il s’agit de nos enfants, c’est une autre histoire. »

Il n’existe pas de solutions simples pour réparer un mariage brisé ni de programme en cinq étapes faciles pour aider votre enfant lorsqu’il traverse des difficultés conjugales, une séparation ou même un divorce. Cependant, il y a certaines choses que vous devez garder à l’esprit, non seulement pour aider votre enfant, mais aussi pour protéger votre propre mariage dans ces moments douloureux.

Vous ne pouvez pas tout réparer

« La réaction naturelle de beaucoup de parents est d’essayer de minimiser ce qui s’est passé, explique Chapman. Ils tentent de limiter les dégâts pour protéger leur fils ou leur fille. À mon avis, c’est une attitude qui manque profondément de sagesse. Les jeunes adultes doivent apprendre à prendre leurs responsabilités par rapport aux décisions qu’ils ont prises. »

Comme le dit Karin Gregory, thérapeute chez Focus on the Family Canada, il existe trois phases d’implication parentale :

  1. Le contrôle : lorsque vous avez un enfant en bas âge qui passe vingt-quatre heures sur vingt-quatre auprès de vous et que vous avez une grande part de contrôle sur ses actes et ses comportements.
  2. L’influence : dès qu’il commence à aller à l’école et qu’il ne passe plus tout son temps avec vous, vous pouvez continuer à influencer ses décisions et son comportement, mais vous n’avez plus un contrôle total sur ce qu’il fait.
  3. L’invitation : lorsque votre enfant devient adolescent puis jeune adulte, l’influence que vous avez sur lui est de plus en plus limitée. Il est alors important de l’inviter à avoir certaines conversations avec vous et de commencer à construire un nouveau type de relation.

« Pour finir, il faut comprendre que votre mariage vous appartient et que le mariage de votre enfant lui appartient. Tout ce que vous pouvez faire, c’est lui montrer que vous êtes là pour l’aimer et l’écouter, » explique Gregory.

Lorsqu’ils voient leur enfant traverser un moment de crise, de nombreux parents éprouvent le désir de revenir en arrière, quand leur enfant était petit, et de pouvoir reprendre le contrôle sur sa vie. Mais en agissant ainsi, ils créent des tensions et suscitent du ressentiment qui peut amener à une fracture dans la relation avec l’enfant. Si vous et votre époux(se) n’êtes pas d’accord sur le degré d’implication que vous devriez avoir dans la situation, prenez du temps tous les deux pour clarifier le niveau de soutien que vous souhaitez apporter à votre enfant et les limites à ne pas dépasser pour vous permettre de savoir quand lâcher prise.

« Faites savoir à votre enfant que même si vous souffrez pour lui et que vous ne pouvez pas effacer toutes les conséquences de cette situation, vous êtes à ses côtés et que vous serez là pour l’aider à traverser les conséquences de cet échec, » écrit Chapman.

Cela ne veut pas dire que vous ne pouvez pas aider votre enfant, mais vous devez le faire en accord avec votre époux(se) et en posant des limites claires, afin que chacun sache à quoi s’attendre.

De quoi devez-vous discuter avec votre conjoint ?

Avant de prendre une décision et de vous précipiter pour aider votre enfant qui se débat dans ces difficultés, vous devez vous assurer que vous êtes sur la même longueur d’onde avec votre époux(se). Souvent, un des deux époux veut sauver leur enfant et tout réparer – que cela signifie le laisser revenir à la maison, prendre soin des petits-enfants ou payer les dépenses supplémentaires – alors que l’autre veut soutenir son enfant en difficulté tout en continuant à profiter de son propre mariage et de sa vie.

C’est la raison pour laquelle il est essentiel que vous discutiez en couple de vos attentes et du niveau d’implication que vous voulez avoir avant de proposer votre aide à votre enfant. Voici quelques éléments dont Gregory vous suggère de parler avec votre conjoint :

1. Quel niveau de soutien financier allons-nous lui apporter ?

S’engager à payer des coûts additionnels liés à une séparation est une décision importante qui doit être prise ensemble, parce que tout don ou prêt financier important aura une incidence sur le plan de votre retraite. Certains parents se sentent obligés d’intervenir et de payer pour leurs enfants, tandis que d’autres considèrent que ce sont des adultes responsables de leurs propres finances, et lorsque ces deux extrêmes se retrouvent au sein d’un couple, cela peut produire des tensions. C’est la raison pour laquelle vous et votre époux(se) devez décider ensemble combien vous donnerez et s’il s’agira d’un don ou d’un prêt. Une fois que vous avez pris une décision à deux, expliquez clairement à votre enfant en difficulté ce à quoi il peut s’attendre de vous.

2. Allons-nous aider nos petits-enfants ?

Pouvons-nous nous permettre de mettre une journée de côté par semaine pour garder les petits-enfants ? Allons-nous les inviter à habiter chez nous ? Quel impact cela va-t-il avoir sur notre mariage ? Voilà des questions valables que vous et votre époux(se) pouvez-vous poser si votre enfant qui se sépare à lui-même des enfants. Chacun de vous doit exprimer ses attentes, puisque certains considèrent qu’ils ont laissé derrière eux les années où ils élevaient des enfants, alors que d’autres sont ravis de reprendre une place de parent plutôt que de grands-parents.

Quelle que soit l’implication que vous choisissez d’avoir dans la vie de vos petits-enfants, il est important de vous rappeler qu’en tant que grands-parents, vous n’êtes pas les premières personnes responsables de discipliner ces enfants. Même si votre fils ou votre fille traverse des moments difficiles, il/elle reste responsable de ses enfants. S’il y a un problème d’éducation ou de manque de discipline, vous devez en parler à votre enfant. Il est aussi important de se rappeler qu’il existe différents styles d’éducation. Peut-être que vous avez été particulièrement strict avec vos enfants et qu’ils se montrent plus indulgents, or le choix leur revient en tant que parent.

3. Si notre enfant revient vivre chez nous, pour combien de temps l’accueillerons-nous ?

À quoi va ressembler notre maison ? Si vous décidez d’ouvrir votre porte à votre enfant en difficulté, il faut que vous vous rappeliez que cela n’oblige pas pour autant votre foyer et votre vie à être centrés sur lui. Qu’il vienne s’installer avec ses propres enfants ou non, il ne s’agit pas pour lui de « rentrer à la maison ». C’est un adulte autonome qui revient vivre chez vous pendant un certain temps. Souvent, il est important de bien choisir ses mots pour éviter de retomber dans les schémas de communication que vous aviez avec lui quand il était adolescent.

« Parfois il est plus facile de le voir comme une cohabitation ou une forme de colocation plutôt que comme une vie de famille, suggère Gregory. Si trois adultes cohabitent, il est plus simple d’aborder la répartition des tâches ménagères et des responsabilités. » Assurez-vous que vous et votre époux(se) êtes sur la même longueur d’onde, sachant que la présence de votre enfant chez vous va avoir un effet sur votre couple, votre communication et votre intimité dans ce qui est censé être une phase sans enfant de votre vie.

Quelles limites poser à votre enfant ?

Comme pour le reste, le fait de poser des limites et de s’y tenir sera une protection pour votre relation avec votre enfant, mais aussi avec votre époux(se). Voici quelques-unes des limites que suggère Gregory pour ceux qui accompagnent un enfant qui traverse des difficultés conjugales.

1. Votre enfant ne peut pas vous obliger à choisir un camp

Votre relation avec votre gendre ou votre belle-fille vous appartient. En dehors de situation de maltraitance, si votre enfant quitte son époux ou son épouse pour des raisons que vous ne comprenez pas entièrement ou avec lesquelles vous n’êtes pas tout à fait d’accord, vous n’avez aucune obligation de couper les liens avec son ex-époux(se). Cette personne est entrée dans votre famille et en fait désormais partie. Il est possible que vous souhaitiez continuer à entretenir une relation avec la personne. Lorsque le fils de David et Mary** a quitté sa femme et son enfant, il s’attendait à ce que ses parents prennent sa défense, comme l’avaient fait toutes les autres personnes autour de lui. Cependant, le couple savait que les choix de leur fils n’étaient pas les leurs et ils avaient bien trop d’amour pour leur belle-fille et pour leur petite-fille pour leur tourner le dos. Ils ont décidé de louer leur appartement en sous-sol à leur ex-belle-fille et de s’assurer qu’elle et sa fille se savaient aimées et entourées. Ce n’était pas à leur fils de prendre cette décision pour eux, mais c’était à David et Marie de faire un choix ensemble.

2. Vous devez passer du temps ensemble tous les deux

Quand une crise survient, il est normal de passer moins de moments en tête-à-tête avec votre époux(se), mais dans de nombreux cas, cela durera seulement un certain temps. Les répercussions d’une séparation ou d’un divorce peuvent durer bien plus longtemps. Lorsque votre enfant traverse ce genre d’événements, il faut que vous soyez conscient que cela peut affecter le temps que votre époux(se) et vous pourrez vous consacrer l’un à l’autre. Si votre enfant emménage chez vous, cela aura des effets sur votre intimité. Il est également important que vous soyez sensible au fait que votre conjoint ne désire peut-être pas investir autant de temps que vous pour prendre soin de votre enfant. Si tel est le cas, parlez chacun ouvertement de vos frustrations, de vos attentes et des limites que vous voulez poser pour protéger votre mariage, même quand celui de votre enfant vacille.

3. Vous ne pouvez pas servir de réceptacle à toutes ses plaintes

Si le seul moment où votre fille vous parle de son mariage c’est pour se plaindre de son mari, il faut que vous vous posiez la question : est-ce vraiment la vérité ou seulement une partie de l’histoire ? Si elle se plaint sans engager le moindre changement, il se peut même que vous deviez aller un peu plus loin et lui expliquer que vous n’êtes pas là pour l’écouter vider son sac. Il se peut que votre époux(se) et vous soyez d’accord pour payer des séances de thérapie de couple pour votre enfant et sa moitié, mais de la même manière que vous ne contrôlez plus ses actions, vous ne pouvez pas non plus contrôler qui ils vont voir, quand, et même s’ils y vont. Vous pouvez suggérer à votre enfant de demander de l’aide, mais expliquez-lui clairement que vous ne pouvez pas lui servir de médiateur ou constamment l’écouter se plaindre.

4. Vous n’avez pas à raconter toute l’histoire à tout le monde

Si votre enfant traverse une séparation ou un divorce, votre communauté d’amis, votre famille et vos voisins voudront peut-être connaître les détails. Cela dit, rappelez-vous que la vie privée de votre famille vous appartient et que vous n’avez aucune obligation de tout partager, même avec les gens qui prient pour vous. Ce n’est pas parce que vous avez demandé la prière pour le mariage de votre enfant que cela signifie que vous deviez partager chaque détail. Discutez avec votre époux(se) et votre enfant pour savoir exactement ce que vous êtes prêts à partager et avec qui.

« Quel que soit leur âge ou le nôtre, nous ne cessons jamais de nous sentir responsables de nos enfants, explique Chapman. Nous ne cessons jamais de souffrir avec eux et pour eux. »

Mais pour votre propre bien, celui de votre époux(se), de vos enfants et de vos petits-enfants, il est essentiel que vous restiez unis en tant que couple et que vous soyez clairs sur les limites que vous posez pour protéger vos relations familiales pendant ces moments délicats.

« Les parents dont les enfants adultes traversent des crises doivent maintenir un équilibre entre leur propre bien-être et leur sens du sacrifice, écrit Chapman. Il est important de s’occuper de sa propre santé et de son bien-être tout en essayant d’aider nos enfants selon leurs besoins. Votre santé physique, émotionnelle et spirituelle doit continuer à être entretenue et vous devez vous préoccuper de préserver votre mariage. »

Si vous et votre époux(se) faites face à ce genre de crise et que vous n’êtes pas d’accord sur le degré d’implication que vous souhaitez avoir auprès de votre enfant, ou si vous souhaitez recevoir prière et soutien dans ce moment difficile, n’hésitez pas à contacter notre équipe de soins et de thérapie. Nous serions honorés de prier pour vous et de vous proposer une consultation téléphonique gratuite ou de vous mettre en lien avec un thérapeute de votre région.

 

*Bien que John et Joan soient un couple fictif, ils sont représentatifs de nombreux couples existants qui font face à ce genre de problème.

**Les noms ont été modifiés pour protéger la vie privée des personnes.

 

Amy Van Veen est Directrice de contenu et des services créatifs chez Focus on the Family Canada.

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