L’amour, c’est un mode de vie

Par Michael Ridgeway

Francis et Lisa Chan ont réduit la taille de leur maison ainsi que leur niveau de vie, permettant ainsi à leur famille de goûter à des joies inattendues et de connaître une plus grande intimité familiale…

Francis Chan est l’auteur à succès de Crazy Love et de Dieu oublié ; c’est aussi le pasteur qui a fondé une « méga-église » très populaire. Et pourtant son épouse Lisa et lui-même ont choisi de percevoir un salaire très inférieur à celui que son succès professionnel pourrait aisément lui offrir. Il verse les bénéfices de la vente de ses livres à des œuvres caritatives et a refusé de continuer à percevoir un salaire de la part de son église, préférant subvenir aux besoins de sa famille par les revenus que Dieu pourvoit lorsqu’il participe à des conférences.

Les Chan et leurs quatre enfants vivent au sein d’un quartier modeste, dans une petite maison parmi tant d’autres. Malgré la petitesse de leur logement, Francis et Lisa ont ouvert leur porte à d’autres, qui sont dans le besoin. Ils accueillent parfois jusqu’à sept personnes à la fois.

Leur style de vie, qui va à l’encontre de la culture qui les entoure, n’est pas une nouvelle expérience sociale alternative basée sur un mode de vie simple et communautaire. Il s’agit plutôt de leur réaction personnelle à l’amour de Dieu envers eux. C’est leur façon d’aimer les autres.
« Dieu nous a placés sur cette Terre, non pas pour que nous connaissions le confort, mais pour aimer les autres et leur porter secours, affirme Francis. C’est une bénédiction pour nos enfants de voir que lorsque Dieu nous bénit en nous donnant quelque chose, nous l’utilisons pour bénir les autres. »

Passer à l’échelle inférieure

La vie des Chan n’a pas toujours ressemblé à cela. Il y a huit ans, ils profitaient de la vie confortable de la classe moyenne supérieure – avec un garage double. Mais en 2002, Francis est allé en Uganda, et les expériences bouleversantes qu’il y a vécues ont poussé sa famille à choisir une nouvelle trajectoire. Dans ce pays ravagé par la guerre, Francis a eu l’occasion d’observer une pauvreté et un désespoir immenses. Il y a vu des enfants de l’âge de ses filles fouiller les poubelles pour trouver à manger.

Après son retour aux États-Unis, l’image de ces enfants souffrant de la faim a continué à le hanter. La pauvreté n’était désormais plus un simple concept – elle avait des noms et des visages. Les mots du Seigneur Jésus : « Aime ton prochain comme toi-même, » ont tout à coup revêtu une nouvelle signification et ont commencé à résonner en lui avec une plus grande insistance. Francis a alors commencé à se demander à quoi cela ressemblerait, pour lui, de véritablement aimer ces enfants souffrant de la misère.

« Je voulais donner autant que j’en étais capable, raconte Francis. Nous n’avions pas tant que cela, mais j’ai commencé à réfléchir au fait que si nous réduisions la taille de notre maison, nous serions alors en mesure de donner plus. »

Lorsqu’il a parlé de cette idée à sa femme, elle n’a pas du tout réagi de façon positive. Bien qu’elle ait donné son accord pour suivre son mari, elle a eu du mal à se défaire de sa maison. Elle n’était pas allée en Afrique avec lui ; elle n’avait pas eu l’occasion de voir ce qu’il avait vu, et n’avait pas le même désir d’abandonner son style de vie pour aider des inconnus à l’autre bout du monde.

Lisa explique : « Il était tellement plein d’angoisse pour ces gens, de passion et d’amour; mais je n’en étais pas au même point. Je ne pouvais pas mentir et simplement dire « Oh, quelle idée géniale ! » Ça a été difficile. »

Malgré sa réticence, le couple a mis leur maison en vente et ils ont commencé à visiter des maisons mobiles, en essayant de trouver le moyen le moins onéreux de vivre. Et puis ils ont entendu parler d’une autre famille qui allait partir pour être missionnaires et qui voulaient vendre leur maison. Cette maison correspondait parfaitement à leurs besoins.

Lâcher prise

Réduire la taille de leur maison signifiait aussi réduire la quantité de leurs possessions. Meubles, appareils ménagers, jouets et possessions ont dû être vendus ou donnés, ce qui s’est avéré être un processus douloureux – celui d’apprendre à se séparer de ses possessions.

De nombreux amis et membres de la famille ont critiqué leur décision : « Ce n’est pas juste envers vos enfants ; comment pouvez-vous leur faire ça ? » D’autres ont objecté que c’était une décision insensée du point de vue financier : « La valeur nette d’une plus grande maison s’accroît plus. » Mais les Chan avaient décidé de s’en remettre à Dieu pour les besoins de leur famille. Et pendant ce temps, Dieu était à l’œuvre dans leurs cœurs.

« Emménager dans cette plus petite maison a été l’un des événements décisifs qui ont changé ma vie, affirme Lisa. Cela m’a permis de me détacher des choses. Cela a complètement changé mon point de vue. »

Ce qui était au départ un sacrifice est rapidement devenu une bénédiction. Leur nouvelle maison les a amenés à se rapprocher, la disponibilité d’un plus grand espace et d’intimité personnelle appartenant maintenant au passé. « On ne pouvait tout simplement plus se cacher les uns des autres, témoigne Lisa. Avec un seul espace de vie, on entend tout ce que chacun fait. Alors on a commencé à passer plus de temps ensemble, à jouer ensemble. »

Jamais auparavant n’avaient-ils formé des relations aussi proches avec leurs voisins. Les maisons étant plus petites, les gens passaient plus de temps dehors, en conversation dans leurs jardins. Les enfants faisaient du vélo. Les femmes échangeaient des fruits et des plats de nourriture.

« Il y avait un esprit de camaraderie, confie Lisa. Nous avons eu beaucoup d’occasions de partager l’Évangile. C’était un contexte bien plus réel. »

Tendre la main

Le même amour qui a poussé les Chan à donner tout ce qu’ils pouvaient donner pour les enfants africains affamés les a également poussés à tendre la main aux gens de leur communauté. Environ un an après leur emménagement, ils ont décidé d’accueillir deux femmes qui avaient besoin d’un toit au-dessus de leur tête, et ont aménagé un espace de vie confortable dans leur garage – jusqu’à ce qu’ils découvrent l’illégalité d’un tel arrangement.

Alors afin de pouvoir honorer Dieu en restant dans les limites de la légalité, ils ont à nouveau déménagé. Depuis, les Chan ont construit une annexe, et même avec cet espace supplémentaire, on a plus que jamais l’impression qu’il y a foule chez eux. Ils partagent en ce moment leur maison avec sept autres personnes – deux femmes célibataires et un couple marié avec deux enfants en bas âge et un bébé.

Francis affirme que leurs nombreux invités de tout genre n’ont pas gêné leur vie de famille, mais l’ont plutôt enrichie. Il n’est pas d’accord avec la conviction américaine que le « temps en famille », c’est lorsque les membres de la famille sont ensemble et que personne d’autre n’est présent. « Les meilleurs moments pour notre famille, c’est lorsque nous tendons la main en famille, aux autres », assure-t-il.

Leur demeure est bruyante, pleine d’animation et de vie. Si vous leur rendiez visite en soirée, vous pourriez bien vous retrouver au milieu de treize personnes autour de la table, partageant repas, rires et anecdotes personnelles – vous y verriez peut-être aussi l’aînée, Rachel, jouant du Bach au piano pendant que les plus jeunes feraient des cabrioles dans le salon et que le bébé réclamerait haut et fort sa nourriture.

Bien qu’il lui soit parfois difficile de trouver un coin tranquille pour faire ses devoirs, Rachel savoure sa vie dans un foyer plein d’animation et d’entrain : « Il y a des jours où le silence ne fait pas partie des options ; mais je ne changerais tout cela pour rien au monde, déclare Rachel. J’aime le bruit et la joie qui saturent cette maison que le Seigneur m’a donnée. »

Apprendre à aimer

Lisa pense que cela a été une bonne chose pour ses filles (14, 10 et 5 ans) et son fils (4 ans) de partager leur maison et leurs vies avec d’autres. « Cela leur a permis de devenir meilleurs. Ils ont appris à gérer des relations avec toutes sortes de gens. Ils ont appris à aimer les autres à travers les bons, les mauvais, les beaux et les affreux moments. »

L’année dernière, ils ont accueilli une femme guatémalienne et ses quatre jeunes enfants. Ils vivaient dans un centre d’accueil pour sans-abri lorsque Francis l’a rencontrée.

« J’ai pensé, comment une dame dans cette situation peut-elle s’en sortir, avec quatre enfants et sans mari ? » De façon inattendue, son séjour s’est avéré être un des plus grands défis relevés par les Chan. Elle ne parlait pas anglais, et ses critères de discipline et de propreté étaient à l’opposé de ceux des Chan, mettant leur famille entière à l’épreuve de manière jusqu’alors inconnue.

À la fin de la première journée, leurs deux filles les plus âgées étaient en larmes. Lisa les a amenées dans une chambre pour les encourager. « Les filles, nous allons tout simplement devoir en appeler à Dieu maintenant, leur a-t-elle dit. Nous allons devoir trouver un moyen de les aimer. »

Avec l’aide d’une amie de la famille qui parle espagnol, Lisa a pris le temps de parler avec cette dame, à propos de la vie, de la façon dont on élève les enfants et de Dieu. L’amour inconditionnel des Chan envers elle a fini par l’aider à reprendre sa vie en main. Cinq mois après avoir emménagé avec eux, elle a pu se procurer son propre appartement.

Lisa comprend que d’autres parents puissent remettre en question sa décision d’exposer ses enfants à de telles circonstances. Elle leur répondrait que l’hospitalité n’a pas mis ses enfants en danger, et que sa famille a fait preuve de prudence dans leur choix d’invités. Bien que partager leur maison ne soit pas toujours chose facile, Lisa a vu comment Dieu utilise ces défis pour rendre ses enfants plus semblables au Christ.

Sa fille Rachel se souvient de ce temps passé avec cette famille démunie comme d’une période de croissance. « La raison pour laquelle ça a été si difficile, au début, c’est que je ne les mettais pas au-dessus de moi-même, se rappelle-t-elle. Ça a été un défi pour moi de comprendre que le monde ne tourne pas autour de moi. Ce n’est pas chez moi, ici. Mon trésor est au ciel, et ma demeure est avec Christ. »

Un tel positionnement laisse Francis et Lisa dans l’émerveillement de ce que Dieu a accompli dans le cœur de leurs enfants. Ils voient maintenant qu’ils ne se sont pas appauvris en passant à l’échelle inférieure – au contraire, ils ont gagné un trésor d’une valeur éternelle.

Cet article a paru dans le numéro de juillet/août 2010 du magazine Thriving Family. Droits d’auteur © 2010 par Focus Famille. Reproduit avec leur permission.