Comment aider un proche lors d’une dépression chronique

Écrit par Lynne Miller

« Peux-tu venir et prier avec maman ? Elle va vraiment mal. »

La voix tendue au téléphone était celle de mon neveu de 18 ans, Jason. Plusieurs mois auparavant, ma petite sœur Rachel s’était effondrée sous le poids de problèmes personnels et de santé. Elle avait finalement cédé au désespoir et sombré dans les profondeurs de la dépression.

Inquiète. J’ai raccroché et me suis rendue chez elle.

La première fois que Rachel avait touché le fond, j’avais passé plus de temps que d’habitude avec elle — à regarder la télévision, faire les vitrines et autre. Remplie de foi et redoublant de prières, je me disais qu’un an plus tard, Rachel émergerait des profondeurs complètement guérie.

Mais ce soir-là, j’ai commencé à me questionner. J’ai trouvé ma sœur en pleurs et effrayée — loin de la guérison et du bien-être.

OÙ EST DIEU ?

Ce n’était pas la sœur que je connaissais depuis plus de 40 ans. Comment cette mère aimante et célibataire, solide chrétienne, pouvait-elle être si désespérée ? Ne ressentait-elle plus la présence de Dieu ?

J’ai commencé, moi aussi, à me poser des questions sur Dieu. Pourquoi semblait-il si sourd à mes prières et aveugle à la douleur de Rachel ? N’avait-il pas promis à Rachel un avenir et de l’espérance ? Pouvait-il vraiment transformer quelque chose comme la dépression comme une chose belle en son temps ? Jusque-là, il n’y avait rien de beau dans cet abysse. Et cet avenir fait d’espérance semblait bien inaccessible.

Après avoir prié avec Rachel, elle s’est apaisée. Mais j’étais épuisée. Plus tard, dans mon lit, mes pensées se sont emballées : pouvais-je laisser Rachel être toute seule ? Allait-elle se suicider ? M’appellerait-elle si elle avait besoin de moi ? Je suis finalement tombée dans le sommeil ; mais sans pouvoir trouver le repos.

BESOIN D’AIDE MOI AUSSI

Rachel n’était pas la seule à souffrir. Je devais faire le deuil d’une sœur que je reconnaissais à peine, mais bien peu de gens comprenaient la profondeur de ma propre peine. Parfois, je pleurais pendant des heures. Chaque jour, mon corps me réveillait extrêmement tôt et j’avais du mal à me concentrer au travail. Un jour, un ami au courant de la dépression de Rachel m’a demandé de manière innocente comment elle allait.

Un sentiment de rancœur s’est alors levé en moi et une question inexprimée m’est venue à l’esprit : et moi ?

Avec le recul, je me rends compte qu’une telle réaction est normale pour un membre de la famille qui doit gérer la dépression d’un proche. J’ai fini par découvrir que pour traverser cet abysse aux côtés de Rachel, il me fallait m’occuper de ma propre santé mentale.

CONNAÎTRE LA DÉPRESSION

J’ai entrepris des sessions avec une thérapeute. Chaque semaine, Janet m’a guidée pour que j’exprime et comprenne mon angoisse. Elle m’a aussi aidée à comprendre la souffrance de Rachel.

Nous avons tous des moments de découragement de temps en temps, mais, chez Rachel, ces moments demeuraient en elle. C’était l’indication d’une dépression majeure, causée par un dérèglement chimique dans le cerveau, et aggravée par des événements traumatiques de sa vie.

J’ai également fait mes propres recherches. J’ai trouvé une vidéo en ligne qui m’a montré les parties du cerveau affectées par la dépression et une liste de symptômes qui correspondaient presque exactement aux comportements que j’avais vus chez Rachel : sautes d’humeur, perte d’appétit et de sommeil, manque d’énergie, isolation, confusion et apathie.

Chaque élément d’information m’a aidée à mieux comprendre l’état de Rachel. J’ai cessé de voir la dépression comme un épisode isolé et anormal pour la considérer comme le diabète ou n’importe quelle maladie demandant un traitement. Finalement, j’ai envisagé la thérapie et les antidépresseurs comme pouvant être la provision de Dieu — sa manière de donner à ma sœur un avenir fait d’espérance.

CHANGER DE RYTHME

Tout comme mes idées premières concernant la dépression étaient fausses, de même, mes efforts pour gérer la dépression de Rachel étaient mal dirigés. En m’efforçant de remonter le moral de Rachel et de l’empêcher de s’autodétruire, je m’étais épuisée moi-même.

Ce n’est pas étonnant. Gérer une dépression, d’après Janet, c’est un marathon. Pour certains, cela prend des mois ; dans le cas de ma sœur, des années. Il fallait que je change de rythme pour tenir.

Pour ce faire, je m’y suis prise de plusieurs manières. Quand Rachel pleurait au téléphone, j’essayais de la comprendre et de ne pas paniquer. Je passais toujours du temps avec elle, mais je résistais au désir de me précipiter chez elle à chaque fois qu’elle appelait. Au lieu de cela, je priais pour que Dieu prenne soin d’elle.

Cela nous a donné à toutes les deux l’occasion de mettre en pratique les techniques d’aide apprises lors de la thérapie, et à moi de décharger le fardeau concernant Rachel sur Celui dont les soins dépassent de loin tout ce que je pouvais faire pour elle (1 Pierre 5.7). J’ai tenu un journal, et y ai déversé des émotions connues de Dieu seul, sur des pages que moi seule lirais. Des mots comme peur et inquiétude sont apparus devant moi, ainsi que les pensées irrationnelles qui leur avaient donné naissance. J’ai fini par voir que mes pensées étaient allées plus vite que Dieu, créant leurs propres scénarios au lieu de lui faire confiance (Proverbes 3.5).

J’ai médité et me suis imprégnée des Écritures qui parlent de la fidélité, de la force et de la compassion de Dieu. De longues marches le soir ont calmé mon esprit, et des couchers de soleil magnifiques m’ont rapprochée du Créateur. C’est dans ces moments, à la fin de la journée, que j’ai pu remettre Rachel à Dieu, puis goûter à sa paix (Jean 14.27) et à son repos (Matthieu 11.28-30) inégalables pour mon âme.

À NOS CÔTÉS DANS L’OMBRE

Cela fait deux ans que j’ai commencé à m’occuper de ma santé émotionnelle. Les profonds sillons de la peine ont été aplanis par Celui dont la présence à mes côtés dans l’abysse me rencontre pas à pas. Je continue à m’appuyer sur lui et à apprendre.

Et Rachel aussi. Elle a trouvé le bon équilibre entre la thérapie et les traitements. Et elle a trouvé une restauration différente de ce que j’avais imaginé au départ. Une complétude spirituelle, forgée par sa dépendance désespérée envers Dieu. Un groupe d’étude biblique pour femmes à l’église a conduit Rachel dans la Parole, et ses amitiés avec des sœurs en Christ la font sortir de sa coquille. La prière est son refuge quotidien.

J’encourage Rachel en marchant à ses côtés. Et je loue Dieu de ce que les signes de notre guérison sont sa manière de faire d’un endroit obscur quelque chose de profondément beau – en son temps.

Lynne Miller a appris que le traitement médical est parfois une nécessité et n’est pas le signe d’un manque de foi ou de force. Elle prie maintenant autant pour les familles et les aidants que pour ceux qui souffrent de dépression.