Saisons du mariage

Écrit par Cynthia Alves

Ce que j’aurais aimé que nous sachions en tant que jeunes mariés

C’était une belle journée d’été. Le soleil pointait à l’horizon et donnait au ciel cette couleur orangée. Vêtue de ma robe rose poudrée, je m’avançais le long de l’allée. Accompagnée des chants joyeux que venait d’entonner l’assemblée, je rejoignais l’estrade de l’église. Avec un certain enthousiasme mêlé d’appréhension, j’allais dire « oui » à celui qui avait fait chavirer mon cœur quelque temps auparavant. Des rêves, j’en avais plein la tête ! Je m’étais déjà fait le scénario de notre vie à deux. Je savais qu’il y aurait des imprévus, mais j’aimais me savoir aux commandes de ma vie, prête pour entamer cette grande étape de ma vie. Les vœux échangés, la cérémonie terminée, je poussais un soupir de soulagement comme pour laisser aller le stress accumulé au ­fil de ces mois de préparation. Ce que je ne savais pas encore, c’est que tout venait de commencer !

On eut une très belle célébration. Le lendemain, on rejoignait notre destination de lune de miel. Ô fameuse lune de miel, comme je pensais que la vie à deux ressemblerait à cela, une parfaite carte postale !

De retour dans notre nouveau nid douillet, notre danse à deux commençait. Mais pour être honnête, cette première année ne fut en rien un conte de fées. Comme une musique qui dérape, il fallut composer avec la réalité. On était des personnes bien différentes et la communication ne semblait plus couler comme pendant nos ­fiançailles. Je me souviens que l’on nous avait offert comme cadeau de mariage un livre de Gary Chapman. J’avais dévoré le livre comme lorsqu’on essaye de trouver la recette magique de la réussite d’un mariage heureux. Ce que je ne savais pas encore, c’est qu’il nous fallait passer par toutes sortes de saisons.

On entrait dans une saison de construction. Tels deux architectes, nous tentions de bâtir un projet commun. Mais voilà, cela n’était pas aussi simple que ce que je pensais. J’avais d’énormes attentes à l’égard de la vie que je voulais mener et je voulais que mon mari se plie à mes requêtes. Je ne voyais pas que je faisais pression sur lui, que j’essayais de le rendre conforme à mes désirs.

Étrangement, les années qui suivirent devinrent plus faciles sans que je me l’explique vraiment. Peut-être étions-nous davantage focalisés sur nos carrières et avions-nous trouvé notre équilibre ? On semblait en effet avoir trouvé un certain équilibre. Et je dois avouer que la routine « métro-boulot-dodo » berçait notre quotidien et nous donnait l’illusion que nous vivions un mariage épanoui. Ce que je ne savais pas encore, c’est que c’était le calme avant la tempête.

Notre saison de turbulence commença à la naissance de notre premier enfant. Un accouchement difficile, un bébé à besoin de soins spéciaux, associés à un certain isolement me faisaient lentement sombrer dans une dépression. De son côté, mon mari entrait dans une longue période sans emploi après l’échec de son entreprise individuelle. Nos ­finances ne suivaient plus la cadence. Nous étions pressés de toutes parts. Les tensions entre nous devenaient vivaces. La communication bienveillante d’avant s’était transformée en dispute ou en silence. Un fossé se creusait entre nous. Nous n’étions plus capables de demeurer côte à côte. C’était la guerre froide ! Je n’avais même plus la force de continuer. Dans un acte de désespoir ultime, je criais à Dieu et lui demandais de nous secourir. J’avoue que je me souciais davantage des dettes que nous avions accumulées et de pouvoir nourrir notre enfant convenablement. Je réalise que c’était la première fois que j’invitais Dieu dans notre mariage. La réponse du Seigneur fut quelque peu surprenante. À l’occasion d’un voyage, mon mari qui s’était enfermé dans le silence jusqu’à présent s’ouvrait soudainement à moi. Alors qu’il ouvrait grand son cœur et laissait échapper le ressentiment accumulé de toutes ces années, je réalisais à quel point notre mariage était dysfonctionnel. Je réalisais que les fondations sur lesquelles nous avions bâti étaient loin d’être saines. Je savais alors qu’il nous fallait tout recommencer. Il nous fallait rebâtir sur de meilleurs fondements. Mais ce que je ne savais pas encore, c’est que pour cela Dieu allait nous faire passer par le pressoir.

Une opportunité venait de s’ouvrir pour un emploi à l’étranger. Nous embarquions notre ­fils d’alors trois ans dans ce pays lointain, quittant ainsi tout ce qui nous était familier. Je me souviens avoir arpenté les couloirs de l’aéroport en me disant de ne surtout pas me retourner. Je savais que je laissais derrière moi la vie telle que je l’avais connue. Avec le cœur serré, je quittais mon pays, ma tribu, ma famille élargie. Aussi, j’essayais de me convaincre que l’avenir allait être meilleur dans cette nouvelle terre.

Hélas, rien ne fut comme je l’avais imaginé. Dans ce nouvel environnement, tout était pénible ! On faisait face à d’extrêmes difficultés. Et cela semblait ne jamais s’arrêter. On essuyait tempête après tempête. Une longue saison d’épuration commençait pour nous.

S’adapter à ce nouvel environnement me demandait de m’ajuster, voire de me redéfinir. J’entamais alors le grand ménage de printemps que mon caractère n’avait jusque-là jamais entrepris. Je passais en revue toutes mes valeurs, mes habitudes, mes croyances, les fondements de mon identité, les éléments culturels que je voulais garder. Et je laissais aller ce qui ne faisait plus de sens avec ma vie au quotidien. Au fur et à mesure que je me confrontais à cette autre culture, je redessinais peu à peu mon être de l’intérieur. Et je dois avouer que ce processus, bien que long, me fût salutaire. En­fin, j’avais le courage d’abandonner ce qui provenait des attentes des autres placés sur ma vie. J’accueillais cette petite voix intérieure qui me poussait vers une version de moi libérée. C’était comme une thérapie divine, une saison de relation ultime avec mon Dieu, l’auteur de ma destinée. Et je le laissais me convaincre qu’il m’avait conçue pour un but précis qu’il me fallait découvrir et accomplir. Soudain, j’étais saisie d’une quête ultime, celle de découvrir la mission à laquelle j’étais appelée.

Pour autant, les batailles ne s’étaient pas arrêtées et la vie était toujours aussi difficile. Sans le soutien de nos proches, mon mari et moi devions faire équipe pour affronter le géant qui se dressait devant nous. On ne pouvait compter que l’un sur l’autre. Il nous fallait soutenir notre famille qui s’était entre temps agrandie. Je ne sais ni quand ni comment, mais dans cette adversité nous avons appris à respecter nos différences. Nous avons commencé à retrouver cette tendre amitié qui nous avait unis dans les premiers jours. Nous avons développé une meilleure communication. On pouvait sentir qu’une grâce particulière nous était donnée dans ce moment de difficultés intenses. Notre foi en Dieu s’était solidi­fiée.

Après plus de sept ans de tribulations intenses, nous avons commencé à avoir de meilleurs jours. Les gros nuages gris se dissipaient, laissant apercevoir des rayons d’espoir. De nouvelles opportunités professionnelles amenaient un mieux-être pour toute la famille. Le calme et la stabilité que nous avions tant recherchés semblaient en­ n à portée de mains.

Après une longue saison de persévérance, nous avons appris à nous aimer d’un amour réciproque, celui qui cherche à donner et non à recevoir. Nous avons appris à nous respecter sans chercher à nous changer l’un l’autre. Nous avons aussi appris à collaborer en abandonnant toutes formes de concurrence entre nous. Nous avons appris à exprimer nos besoins l’un à l’autre et ce, le cœur à nu autant que possible. Nous avons appris à nous soutenir même lorsque nous sommes en désaccord.

Dans l’adversité, j’ai appris à m’aimer et me célébrer afin d’être capable d’aimer mon époux. J’ai arrêté d’attendre qu’il comble les vides de mon existence, qu’il panse les blessures de mon passé, qu’il mène ma destinée. J’ai appris à valoriser ma relation avec Dieu en premier puis à investir dans mon mariage en second. En­fin, j’ai laissé Dieu être le chef de notre foyer.

Sans doute, il est à temps pour nous, à présent, d’entrer dans une saison de simplicité ou de retrouver la beauté d’un mariage simple sans attentes ni prétention.

« Mes frères, regardez comme un sujet de joie complète les diverses épreuves auxquelles vous pouvez être exposés, sachant que l’épreuve de votre foi produit la patience. Mais il faut que la patience accomplisse parfaitement son oeuvre, afin que vous soyez parfaits et accomplis, sans faillir en rien. » (Jacques 1.2-4)

 

Cynthia Alves est coach de vie et coach parental. Dotée d’un véritable don pour l’encouragement, elle aime aider et motiver chacun à réaliser son plein potentiel. Retrouvez-la sur son site internet : www.cynthiaalves.com

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