Repousser les limites de nos ados

En cherchant à tout prix à garder nos ados en sécurité, nous empêchons souvent leur foi et leur caractère de grandir. 

Écrit par Ray Johnston

L’année dernière, au moment de préparer notre voyage annuel au Mexique avec les jeunes de l’église, un père est venu me voir : « J’envisage de laisser ma fille de quinze ans participer à ce voyage, mais j’ai une question. Est-ce que vous pouvez me garantir qu’elle sera en parfaite sécurité ? »

Je l’ai regardé droit dans les yeux et j’ai répondu : « Non. »

Il a eu l’air choqué.

J’ai continué : « Je ne peux pas garantir que ce voyage soit complètement sûr. Mais je peux vous garantir ceci : il sera beaucoup plus sûr pour votre fille de partir au Mexique et de partager sa foi publiquement, d’apprendre à servir, de développer sa générosité et de dépendre réellement de Dieu plutôt que de grandir dans une communauté où sa foi n’est jamais mise à l’épreuve, où elle ne prend aucun risque et suit une routine parfaitement huilée qui l’amènera à croire qu’elle peut se passer de Dieu. »

En tant que parents, nous nous inquiétons souvent pour la sécurité de nos ados. C’est l’une des raisons pour lesquelles nous leur imposons des limites. Mais le problème, c’est justement que les adolescents aiment tester les limites. Si nous essayons de les garder sous clé, ils vont forcément chercher la faille pour s’échapper.

Mais si nous les exposons à la réalité de la vie, dans des situations où ils sont appelés à mettre leurs valeurs en pratique, à exercer leurs dons et à dépendre de Dieu, ils développeront des convictions bien plus profondes et un caractère bien plus solide.

Un âge pour tester les limites

Le directeur d’une école privée qui interdit à un jeune de choisir sa coupe de cheveux est surpris de le voir arriver quelques jours plus tard avec une perruque. Un père qui interdit à sa fille de fréquenter un certain garçon se retrouve choqué d’apprendre qu’elle sort en douce le soir pour aller le retrouver.

Ces scénarios n’ont en fait rien de surprenant. Lorsqu’ils atteignent l’âge de treize ou quatorze ans, les enfants passent de la phase de « découverte » pour entrer dans la phase de « test » (un moment important de leur développement). C’est un âge où ils prétendent qu’ils n’ont pas de parents, nous demandent de les déposer loin de l’entrée de l’école, et deviennent maîtres dans l’art de répondre en levant les yeux au ciel. Durant cette phase, les parents ont souvent pour réflexe de les empêcher de tester les limites. Nous verrouillons tout jusqu’à ce qu’ils partent à l’université. Et quand ils reviennent au bout du premier semestre avec des notes en chute libre, une grossesse non désirée ou un casier judiciaire pour possession de drogue, nous nous demandons ce qui a bien pu se passer.

Lorsque nous imposons à nos ados de faire les choses à notre façon, sans leur laisser aucun autre choix, nous les incitons à nous défier. Une meilleure approche est de diriger leur tendance à vouloir repousser les limites vers des comportements positifs.

 

Encadrer leur phase de test

Bien sûr, même s’il est bon de laisser nos ados faire des choix, il reste important de poser des limites quand ces choix impliquent des comportements à risque. Ceci dit, il existe des manières saines et créatives d’encadrer nos ados dans ce type de situations.

Avec ma femme Carole, nous n’avons jamais pris à la place de nos ados une décision qu’ils pouvaient prendre par eux-mêmes. Au lieu de ça, je leur demandais régulièrement : « qu’est-ce que tu penses de…? » et cela lançait le débat. Les laisser développer leur propre réflexion les a aidés à prendre confiance en eux, et à avancer tout en restant encadrés. Et si leurs choix s’orientaient vers des situations potentiellement malsaines, j’intervenais pour les aider à reconsidérer les choses.

Je connais des parents qui ont donné à leur fille de seize ans une somme d’argent avec la responsabilité de s’occuper des factures de la maison. Elle a pu se rendre compte qu’elle était capable de gérer un budget, et elle a aussi appris, par la même occasion, que le fait d’allumer la lumière ou la télévision n’était pas gratuit. Elle a pris confiance en elle et a développé son sens des responsabilités, ce qui l’a éloignée du désir de toujours tester les limites posées par ses parents.

L’une des choses qui nous préoccupent vraiment face à nos ados, c’est de savoir s’ils nous suivront ou non dans notre foi. Et le mieux que nous puissions faire, c’est de leur donner à voir concrètement les valeurs qui nous tiennent à cœur. S’ils voient que nous vivons vraiment ce que nous croyons, nous pourrons mieux les guider pour qu’ils mettent en acte leurs propres dons spirituels, leur foi en Dieu et leurs capacités personnelles.

Qu’en est-il de ce papa qui s’inquiétait du voyage au Mexique ? Il a accepté avec joie de laisser partir sa fille. Et elle ne s’en est jamais remise… dans le meilleur des sens possibles. En lui offrant une possibilité de repousser ses limites, son père a influencé pour le mieux la manière dont elle a ensuite développé ses convictions et son caractère. Nous pouvons faire la même chose pour nos ados. Et c’est le meilleur moyen de garder nos ados « en sécurité » tout en les guidant vers une foi en Dieu plus solide et plus profonde.


 

Ray Johnston est auteur et pasteur en Californie.

Cet article a été publié dans le numéro de janvier 2016 du magazine Thriving Family sous le titre « Stretching the Limits ». Tous droits réservés © 2015 par Ray Johnston. Utilisation autorisée.