Transformer la colère en attention

Développer notre intelligence émotionnelle peut nous aider à comprendre nos réactions et à réagir avec plus de maturité

Écrit par Pauline Doerksen

Avez-vous déjà vécu un de ces jours qui se déroule vraiment parfaitement ? Vous avez particulièrement bien dormi. Les choses se mettent en place comme vous le voulez. Les enfants se sont levés et se sont préparés pour l’école sans drame. Tout le monde est sorti de la maison avec le sourire aux lèvres. Vous vous mettez au travail et ouvrez votre courriel pour trouver un message d’encouragement : « Salut, Pasteur, je voulais juste vous dire que je suis reconnaissant pour votre travail et que je prie pour vous aujourd’hui. »

Votre journée se poursuit sous les mêmes auspices. Vous avez des conversations profondes et intéressantes avec d’autres membres du personnel, vous avez de bonnes idées pour votre prochain sermon. Ou peut-être que le groupe des femmes a accueilli de nouvelles mamans aujourd’hui avec lesquelles vous vous êtes vraiment bien entendu et qu’en plus, vous avez eu le temps de vous asseoir et de prendre un café avec un ami. C’est comme si le soleil brillait sur vous. Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes.

Vous rentrez chez vous et retrouvez votre famille autour d’un bon repas, et vous entendez ce « ping » caractéristique sur votre téléphone. En jetant un coup d’œil rapide, vous remarquez le nom de la personne qui vous envoie ce texto et vous apercevez un petit bout de l’objet du message et boum ! Vous pouvez sentir la tension monter, votre rythme cardiaque s’accélérer. Vous n’arrivez plus à accorder toute votre attention à la conversation qui se déroule autour de la table, car vous êtes maintenant préoccupé par le message que vous venez de recevoir.

Votre famille continue à échanger ses plaisanteries habituelles et cela commence à vous agacer. Tout le monde parle en même temps, le dîner n’est pas si bon que cela et votre réaction à l’histoire que le petit Johnny a pris une éternité à raconter était un peu cassante, dure et probablement exagérée.

Vous êtes agacé. Quelque chose dans ce texto vous a énervé et vous n’arrivez pas vraiment à vous reprendre. Malheureusement, ceux qui pâtissent de vos réactions n’ont aucune idée de ce qu’il se passe et ils essayent de comprendre pourquoi vous êtes soudain de mauvaise humeur. De plus, il faut être honnêtes, un rien suffit de nos jours à vous faire changer d’humeur. Vous avez l’impression que cela se produit de plus en plus fréquemment.

Est-ce que tout cela vous parait familier ? Vous vous demandez si j’ai caché une caméra dans votre salle à manger et enregistré exactement ce qui s’est passé hier soir. Eh bien, disons simplement que ladite caméra aurait souvent pu enregistrer la même chose chez moi et ce n’était pas très beau à voir.

Comprendre la santé émotionnelle

Nous passons notre temps à faire face à nos réactions émotionnelles. Parfois, elles nous tombent dessus avec force et notre capacité à les réguler semble complètement nous échapper. D’autres fois, elles sont attendues, gérables et appropriées à la situation dans laquelle nous nous trouvons.

Lors de nos retraites à Kerith1 pour les leaders de ministère, nous ouvrons le dialogue autour de la santé émotionnelle sans honte ni jugement. Nous voulons savoir comment nos hôtes se sentent réellement dans le stade de leur vie où ils se trouvent. Sont-ils capables de réguler leurs émotions de manière équilibrée, ou sont-ils tellement à bout que le moindre détail parait trop lourd à gérer ?

L’une des façons dont nous approchons ce sujet est de demander à nos invités de remplir l’analyse de caractère de Taylor-Johnson (TJTA). Cela nous permet d’obtenir un aperçu de leur santé émotionnelle au moment où ils remplissent l’évaluation. Si nos hôtes sont mariés, nous demandons également à leur époux(se) de remplir l’évaluation en fonction de ce qu’ils ont observé chez la personne. Cela nous donne deux comptes-rendus ; l’un sur la façon dont la personne se sentait au moment où il a rempli l’évaluation, et un deuxième sur la façon dont l’époux(se) voit ses comportements par rapport à ces mêmes émotions.

Comme vous pouvez l’imaginer, cela ouvre la porte à un merveilleux dialogue avec nos invités. La plupart du temps, les gens ne sont pas particulièrement surpris par leurs résultats. Comme ils ont commencé par partager leurs histoires avec nous, ils ont souvent déjà décrit une partie du stress, des conflits, des crises et de l’épuisement qu’ils traversent. D’autres ont connu une période plus facile, et ils prennent ce temps de retraite de façon proactive pour prendre soin de leur âme, et leur compte-rendu TJTA montre qu’ils gèrent leurs émotions de manière saine.

Examiner avec courage notre mauvaise santé émotionnelle

Quelle que soit la situation que traversent nos hôtes, il y a une chose qui revient souvent. Il peut être difficile d’examiner un compte-rendu qui met parfois en évidence des domaines de notre vie pas tout à fait sains. Même lorsque nous savons que nous ne nous en sortons pas aussi bien que nous aimerions ou estimons que nous « devrions », cela reste désagréable de voir un test venir confirmer notre mauvaise santé émotionnelle. D’un autre côté, cela peut mettre en lumière la situation et attester combien la personne traverse une période difficile.

J’ai eu l’occasion d’en faire moi-même l’expérience il y a douze ans. C’était quand nous avons participé à une retraite de Kerith Retreats en tant qu’invités. Nous servions dans le ministère pastoral depuis près de vingt ans et j’étais vraiment épuisée. Ma mauvaise santé émotionnelle était sur le point de m’apprendre quelque chose que je ne savais pas sur moi-même. Passer en revue nos résultats du TJTA a été difficile, mais ceux-ci étaient aussi très justes.

Le problème était que je n’avais plus d’énergie disponible pour gérer mes émotions et je devenais de plus en plus colérique, confuse et frustrée. Je savais que quelque chose n’allait pas et que je devais changer. J’avais souvent prié pour que Dieu me donne plus de force, d’énergie et de compassion pour le ministère, mais je n’avais jamais pensé que sa réponse serait de me demander d’apprendre à me reposer, à récupérer, à prendre du temps pour moi. Dans mon esprit, ces choses ressemblaient à un échec, à une faiblesse et à une forme de désobéissance. Je me surmenais et je m’attendais à ce que Dieu donne surnaturellement à mon corps une force pour laquelle il n’était pas conçu. Alors plutôt que d’accepter la réalité de mes limites humaines, je dirigeais ma colère et ma frustration contre Dieu pour ne pas m’avoir fourni ce que je pensais être nécessaire.

Évidemment, mon système de croyances tordu devait finir par s’effondrer, et je peux dire aujourd’hui que je suis très reconnaissante que cela ait été le cas. Je suis reconnaissante que Dieu ait été patient et tendre dans la façon dont il m’a ouvert les yeux. Il m’a montré qu’il était content quand je travaillais dur et aussi quand je me reposais bien. Ces deux aspects ne sont pas censés être en concurrence. Ils sont censés travailler main dans la main.

Transformer la colère en attention

Au fur et à mesure que j’ai commencé à apporter des changements, ces épisodes de « colère » sont devenus de moins en moins fréquents. Aujourd’hui, lorsque je ressens ces sentiments familiers, j’essaye de me donner du temps et de l’espace pour rediriger mon attention, assumer la responsabilité de ce que je ressens et ma façon de réagir. Le changement n’a pas été facile, mais il a été porteur de vie.

Qu’est-ce que votre colère essaye de vous dire ? Je vous encourage à devenir attentif, à vous montrer honnête et à permettre à votre Père céleste de faire en vous un changement en profondeur ! Vous pouvez aussi choisir d’ignorer vos réactions émotionnelles, mais celles-ci ne disparaitront pas. Elles ne feront que devenir plus incontrôlables et causeront des dégâts dans votre vie et dans celle de ceux qui vous sont chers.

 

Pauline Doerksen et son mari, Sam, sont les directeurs de programme de notre centre de retraites Kerith Retreats au Manitoba.

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1 Le programme de retraite pour leaders et responsables de ministère Kerith Retreat de Focus on the Family Canada n’est actuellement proposé qu’en anglais. Pour en savoir plus : KerithRetreats.ca.