La table, un lieu de profonde transformation

Ecrit par Suzanne Hadley Gosselin

Il y a quelques années, Kathy Fletcher et David Simpson ont trouvé une manière originale d’approcher les amis de leur fils alors adolescent : les inviter à diner. Dans son article « The Power of a Dinner Table » [Le pouvoir d’une table], le journaliste David Brooks met en lumière la démarche de ce couple et combien cela a transformé la vie de ces ados :

« Les jeunes qui se retrouvent chez Kathy et David ont traversé les épreuves de la pauvreté moderne : la faim, le froid, les abus en tout genre, les agressions sexuelles. Ils ont presque tous côtoyé la mort de près, celle d’un parent, d’un frère, d’un ami.

Ils ne savent même plus ce que c’est d’avoir un lit au chaud, chez eux. Une jeune femme de 21 ans est venue diner la semaine dernière et a dit que cela faisait plus de dix ans qu’elle n’avait pas mangé en famille autour d’une table.

Et pourtant, par miracle, ce sol inhospitalier a produit des fleurs de toute beauté. Les diners du jeudi sont devenus l’événement social de la semaine. Les jeunes y viennent de toute la ville. Poulet épicé et riz noir au menu. Les téléphones portables sont interdits (« Soyez présents au présent », répète Kathy). »

Ces repas partagés deviennent un lieu d’espérance, de guérison. Des ados venus de la rue sont maintenant à l’université grâce à ces diners. Mais au-delà de ça, ils ont trouvé un lieu sûr ou ils peuvent être eux-mêmes, donner et recevoir de l’amour et se sentir compris, estimés par les autres. La table de David et Kathy transforme littéralement des vies.

La table est un lieu pour manger, tisser des liens,
rire, pleurer, prier et être humain. 

La joie des repas en famille

Lorsque j’ai quitté le cocon familial à 22 ans, j’ai plus ou moins abandonné les repas en famille que j’avais toujours eu l’habitude de partager. Je n’ai pas vraiment vu la différence au début. Après tout, c’était plutôt sympa de pouvoir faire mes propres choix de repas, ce qui revenait souvent à manger des restes, ou un bol de céréales pour le diner. Mais au cours de ces deux années où j’ai vécu seule, j’ai ressenti un vrai manque sur le plan émotionnel et social.

Quand j’ai emménagé dans une colocation avec trois autres jeunes femmes, nous avons fait le choix de manger ensemble plusieurs fois par semaine. L’une d’elles essayait sans arrêt de nouvelles recettes de soupe (oui, elle aimait vraiment la soupe !). Et une autre avait un don pour organiser des invitations à diner.

Quand le jour de l’Action de grâce est arrivé, nous avons chacune préparé un plat et nous avons invité quelques amis qui étaient loin de leur famille. Après avoir bien mangé, nous avons échangé des histoires, fait des jeux et la maison s’est remplie de nos rires. Ensuite, nous avons enfilé nos manteaux pour affronter le froid extérieur, et sommes sortis décorer l’arbre qui était devant la maison avec des lumières de Noël.

L’année suivante, quand j’ai monté un groupe de théâtre d’improvisation avec quelques amis, nous avons décidé de manger ensemble au début de chaque rencontre. Chacun notre tour, nous avons accueilli la troupe et offert le repas. Parfois on mangeait du steak, et d’autres fois des sandwichs au fromage grillé. Cela n’avait pas grande importance ; le fait d’être ensemble et d’échanger, voilà ce qui nous importait vraiment. Souvent, on plaisantait en se disant que nos repas partagés nous rendaient plus performants encore que nos répétitions. Et c’était surement vrai. Ces années-là ont été pour moi parmi les plus riches années de ma vie de jeune adulte, en particulier grâce à ces repas.

Se retrouver autour d’une table : une discipline

La table est un lieu puissant qui est souvent mentionné dans la Bible. Dieu dresse une table pour nous face à nos ennemis (Psaume 23.5). On parle souvent de festins et de banquets, dont le festin des noces de l’Agneau lorsque Dieu établira son règne éternel. Jésus a passé beaucoup de temps à table : mangeant avec les pécheurs, partageant la Paque avec ses disciples, préparant le petit déjeuner pour Pierre sur le bord du lac de Tibériade. Dans l’article « The Dinner Table as a Place of Connection, Brokenness, and Blessing » [La table, un lieu de connexion, de vulnérabilité et de bénédiction], Barry D. Jones écrit :

Je suis persuadé que l’une des disciplines spirituelles avec laquelle nous devons absolument renouer de nos jours, c’est la discipline de se retrouver autour d’une table. Dans un monde où tout va vite, où la technologie est omniprésente et où notre capacité d’attention est sans cesse réduite, les chrétiens ont besoin de revenir à l’art de prendre le temps de manger autour d’une table avec ceux qu’ils aiment. « Se retrouver autour d’une table » ne fait pas partie des disciplines spirituelles classiques. Mais dans ce monde qui semble de plus en plus perdu en ce qui concerne aussi bien la nourriture que la santé de nos âmes, la spiritualité chrétienne a un message important à transmettre concernant le fait que les repas partagés nous nourrissent aussi bien physiquement que spirituellement. Nous devons retrouver le sens spirituel de ce que nous mangeons, où nous mangeons et avec qui nous mangeons.

Dans un monde où tout va vite, où la technologie est omniprésente. Les chrétiens ont besoin de revenir à l’art de prendre le temps de manger autour d’une table avec ceux qu’ils aiment.

La table est un lieu pour manger, tisser des liens, rire, pleurer, prier et être humain. Et par-dessus tout, la table est un lieu pour se sentir inclus et en sécurité. C’est ce que David et Kathy ont découvert. Dans un monde aussi divisé, les tables rassemblent les gens. Qui pouvez-vous inviter à votre table ? Chez qui pourriez-vous aller manger ? Et en cette année 2017, comment pouvez-vous incorporer dans votre vie la discipline de se retrouver autour d’une table ?

Jones écrit ceci : « Peut-être qu’avant d’inviter les gens à rencontrer Jésus ou de les inviter à l’église, nous devrions les inviter à diner. » J’aurais tendance à être d’accord. Pour les saints comme pour les pécheurs, c’est là qu’ils ont trouvé Jésus.

Suzanne Hadley Gosselin est une auteure indépendante qui traite régulièrement des questions liées au célibat, aux relations, au mariage et à l’église. Suzanne est diplômée de journalisme et de théologie biblique. Elle est mariée et a trois enfants. Lors de son temps libre, elle aime conduire dans les montagnes, boire un bon café et sortir avec son mari.

Traduction © 2018 Focus on the Family.  Tout droit réservé.  Utilisé avec permission.  Publié à l’origine en anglais sur boundless.org/blog.