Ayez le cœur en paix

Par Jeremy Favreau

Pour être totalement honnête avec vous, je trouve qu’atteindre et maintenir la paix intérieure est l’une des choses les plus difficiles qui soient. Je ne parle pas de la paix avec Dieu (ou de la paix concernant mon sort éternel), mais plutôt de la paix face à mes propres pensées. Ces pensées qui m’accusent de ne pas être à la hauteur, de ne pas en faire assez, de ne pas être la personne que je devrais être.

Et pourtant, je sais bien que ces soucis sont fondés sur un mensonge concernant mon identité. Si je crois réellement que Dieu a créé le monde, et qu’il m’a créé en tant qu’élément expressément voulu et irremplaçable à l’intérieur de celui-ci, c’est donc que ma valeur provient de sa volonté, et non de ma performance ou de ce que je fais de ma vie. Croire l’opposé serait de mettre la charrue devant les bœufs.

J’existe parce que Je Suis a voulu que j’existe. Ma valeur ne dépend donc que d’une seule chose : être.

La raison pour laquelle plusieurs d’entre nous luttent constamment avec notre valeur, c’est que nous nous voyons comme étant fondamentalement séparés de Dieu, et que nous pensons avoir plusieurs étapes à franchir avant de pouvoir approcher notre Père, qui franchement, ne nous semble pas toujours très approchable. Nous nous voyons comme un opprobre à ses yeux, et doutons qu’Il puisse vraiment s’intéresser à nous.

Il est vrai que notre péché a créé un gouffre qu’il nous est impossible de franchir par nous-mêmes, mais Dieu n’est pas pour autant loin de nous. Et il veut nous avoir près de lui, bien plus que nous ne pourrions l’imaginer. Pourquoi est-il alors si difficile pour plusieurs d’entre nous de percevoir cet amour dans le récit biblique ? Et surtout, de le recevoir ?

Pour corriger notre vision de Dieu et de nous-mêmes, il faut considérer l’Évangile à partir du bon point de départ

Le problème, c’est que nous pensons que l’Évangile commence par le fait que l’être humain est séparé de Dieu (« car tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu » Romains 3.23). Notre premier aperçu de Dieu est donc celui d’un être divin qui ne peut tolérer la déchéance humaine, et dont la colère et le châtiment risquent constamment de déborder sur les rebelles. Quand nous percevons ainsi l’Évangile, nous voyons les êtres humains comme fondamentalement mauvais, pécheurs et en opposition à Dieu.

Fort heureusement, l’histoire ne s’arrête pas là. Jésus meurt sur la croix et offre à tous le pardon des péchés et la vie éternelle. Nous pouvons être réconciliés avec Dieu et éviter toute condamnation. Toutefois, bien que la colère de Dieu soit assouvie à notre égard, cela ne change pas pour autant notre perception initiale de lui et de nous-mêmes. Nous continuons de nous percevoir comme étant foncièrement mauvais, insuffisants et insatisfaisants. Nous avons l’impression que Dieu nous tolère maintenant, grâce au sang de Jésus, mais qu’il reste un Être suprême constamment frustré contre une humanité qu’il supporte difficilement et, semble-t-il, malgré lui.

Nous nous savons pardonnés, mais nous ne nous voyons pas nécessairement comme désirés, voulus ou même acceptés par Dieu. Et aussi longtemps que nous avons cette conception de Dieu, nous serons toujours sous le joug de la performance, en proie à la critique sur ce que nous faisons ou ne faisons pas de nos vies.

Mais en fait, l’Évangile ne commence pas avec la chute de l’homme ! Il commence au tout début de la grande histoire biblique avec la création d’un monde déclaré bon par son Créateur. Au sommet de son œuvre magistrale, Dieu crée les êtres humains à son image et de ce fait, leur accorde une valeur singulière et immesurable. Avant que nous ayons fait quoi que ce soit, de bon ou de mauvais, Dieu nous a aimés par choix. Il nous a accordés une valeur intrinsèque par le seul fait de notre existence, une valeur qui ne dépend nullement de ce que nous pouvons faire ou devenir.

Pour corriger notre vision de Dieu et de nous-mêmes, il faut considérer l’Évangile à partir du bon point de départ. La chute de l’homme est un chapitre essentiel du récit biblique. Sans elle, nous nous retrouvons avec un récit sans issue et sans espoir. En fait, sans comprendre la chute, nous ne pouvons pas comprendre le cœur humain ni l’amour de Dieu. Et sans diagnostiquer la maladie qui nous menace de mort, nous ne saurions pas nous prémunir du remède.

Cependant, avant la chute qui a introduit la rébellion et la corruption dans l’histoire humaine, il faut se rappeler que la toute première condition humaine est celle de perfection à l’image de Dieu. Dieu nous a faits comme lui pour être en relation avec lui et pour vivre comme il l’entend. Bien que nous soyons tous tombés de cet état initial, son amour n’a pas subi le même sort.

Tel un père qui ne cessera jamais d’aimer son enfant, bien que cet enfant puisse l’attrister profondément par ses choix de vie, Dieu a toujours conservé son amour pour les êtres humains. Cet amour, manifesté en Jésus, est le même qui existe depuis l’aube des temps. Son amour ne dépend pas de nous. Il nous aime, car il est amour, et rien de ce que nous pouvons faire ne peut changer cela. Nos cœurs peuvent donc être en paix.

 

Jeremy Favreau est auteur et leader créatif chez Pouvoir de Changer – Étudiants. Passionné des grandes questions, il est toujours prêt à dialoguer sur l’évangile, la culture et leurs innombrables points de rencontre. Lui et son épouse Selene résident à Montréal et sont parents de trois garçons.

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