Pour le meilleur ou pour quoi ?

Écrit par Tim Kimmel

Plus de quatre décennies se sont écoulées depuis que mon épouse, Darcy, et moi avons prononcé nos vœux devant l’autel. Depuis ce jour, nous avons assisté à plusieurs reprises aux échanges de vœux d’autres couples. C’est fou de voir à quel point nous comprenons ces mots différemment aujourd’hui. C’est généralement l’effet qu’ont des décennies de vie conjugale sur la perspective d’un couple.

Et je crois savoir pourquoi. Tout d’abord, lorsque de jeunes couples se marient, ils agissent souvent tout en étant dans une bulle d’illusion. C’était certainement notre cas ! Ils ont tendance à croire qu’il sera toujours facile de s’aimer et qu’ils auront bien assez d’amour pour faire face à tous les ajustements et les épreuves qui les attendent. Puis la vie conjugale commence et cette bulle éclate. Rien de mieux que la réalité pour vous préparer à la réalité.

Aujourd’hui, lorsque nous entendons les mots « pour le meilleur et pour le pire », nous reconnaissons vraiment la sagesse de l’auteur original. Le temps nous a appris que le vrai défi n’était pas de formuler ces promesses. Le défi, c’est de maintenir un lien de cœur malgré toutes les difficultés qui surviennent quand on essaye de tenir ces promesses.

Une lutte universelle

La plupart des couples commencent leur vie à deux en amour par-dessus la tête. Vous pourriez même penser que ces couples ont déjà tout l’amour dont ils auront besoin pour la route à parcourir. Mais il n’est pas étonnant que ce même amour semble fatigué et érodé après des années :

  • à s’ajuster aux préférences de l’autre,
  • à gérer ses problèmes en recourant aux suggestions d’une culture qui incite à tenir des comptes,
  • à faire face aux coups inévitables et parfois durs de la vie,
  • à répondre à tout ce qui menace le respect de son engagement envers l’autre, et
  • à réaliser que chaque membre du couple est naturellement égoïste.

Si vous êtes marié(e), ou que vous l’avez déjà été, vous avez probablement fait face, à un moment ou un autre, à chacun des défis de cette liste. Or, ces défis alimentent un cercle vicieux : l’amour est d’abord mis à l’honneur, puis mis à l’épreuve et en fin de compte l’amour arrive à bout. On n’en arrive pas forcément au point de se sentir misérables ni de tout laisser tomber. Mais il devient en revanche difficile de maintenir un lien du cœur – de continuer à s’accrocher à un engagement de qualité du type « Je suis tellement content d’être marié avec toi et je brûle d’impatience de voir ce que l’avenir nous réserve ! »

Avant de continuer, je tiens à préciser ce que j’entends par lien de cœur. Tout couple peut arriver à rester lié par une adresse, un compte en banque ou des enfants. Mais rester lié par le cœur, c’est toute autre chose. Il ne s’agit pas de deux personnes vivant indépendamment l’une de l’autre ni de manière dépendante l’une sur l’autre. Il s’agit de deux personnes qui vivent inter-dépendamment l’une pour l’autre. Avoir un lien de cœur, c’est quand deux personnes se réjouissent de vivre leurs vies individuelles d’une manière qui fait grandir la confiance mutuelle, et qui ajoute constamment de la valeur à leur identité de couple.

Nous connaissons tous un couple marié qui n’est pas lié par le cœur — vous pensez peut-être même à votre propre couple. Et certains de ces couples sont ceux-là mêmes dont je vous parlais plus tôt et qui ont commencé leur cheminement en amour par-dessus la tête. Alors pourquoi le lien du cœur change-t-il avec le temps ?

Les limites de l’amour

Dieu est amour et chaque être humain porte en lui l’image de Dieu. Par conséquent, chaque « porteur d’image divine » est capable d’aimer. Alors pourquoi aimer c’est d’abord facile, puis cela devient-il difficile ? Le problème réside dans la source véritable de cet amour. Cette source peut jaillir soit de la capacité illimitée de Dieu, soit de la capacité limitée d’un individu. L’amour que l’on retrouve au cœur de nos mariages provient souvent de notre capacité humaine limitée. Ce n’est pas une critique ; les choses ont simplement tendance à être ainsi — même pour les gens qui ont de fortes convictions spirituelles.

Lorsqu’on définit l’amour en nous basant sur la façon dont il doit fonctionner dans un mariage, c’est facile de voir pourquoi la plupart des couples sont déficitaires. Voici comment j’aime définir l’amour : l’amour, c’est l’engagement à soumettre votre volonté aux besoins de votre époux(se) et à ce qu’il y a de mieux pour lui, quel qu’en soit le coût.

Cette définition de l’amour est faisable seulement dans la mesure où votre époux(se) n’exagère pas trop. Mais quand s’accumulent et se répètent les déceptions, les promesses brisées, les paroles blessantes, les occasions manquées d’être avec les enfants et les périodes prolongées d’indifférence — le tout, vécu dans un contexte de vies beaucoup trop occupées — alors personne n’a la capacité innée de maintenir un lien de cœur.

C’est la raison pour laquelle nous avons tous besoin d’un Sauveur. La clé pour maintenir un lien du cœur malgré tous les défis de la vie conjugale, c’est premièrement de maintenir un lien de cœur avec celui dont l’amour ne connaît aucune limite. Darcy et moi étions mariés depuis déjà plusieurs années avant que cette réalité nous atteigne vraiment au cœur. Pendant longtemps, nous avons cru que notre amour pour Dieu nous garantissait automatiquement un amour conjugal sain. Le problème, c’est que l’on basait notre raisonnement sur notre amour envers Dieu. Rappelez-vous : notre amour est limité.

Nous étions nous-mêmes à la source de notre amour, mais tout a changé le jour où Dieu est devenu la source de notre amour. Ce n’est pas mon amour pour Dieu que je veux apporter dans ma relation avec Darcy, mais plutôt l’amour de Dieu pour moi. Son amour a pu traverser chacune de nos vies, et se déverser l’un sur l’autre, le jour où nous avons décidé individuellement, une fois pour toutes, de laisser à Dieu la place qui lui revient, celle de Seigneur de nos vies.

Quatre choses caractérisent ce genre de relation avec Dieu : votre but principal devient de lui faire confiance ; vous vous assurez que vos priorités s’alignent constamment aux siennes ; vous vous en remettez à lui quand vient le temps de prendre des décisions ; et vous trouvez que vivre en lui obéissant est une grande source de joie. Laisser Dieu être la source de votre amour change tout. Et, le bon côté de tout cela, c’est que lorsque Dieu transmet son amour à votre époux(se) à travers vous, sa grâce caractérise alors la façon dont vous gérez les problèmes — petits et grands — au sein de votre mariage. Alors, à quoi ressemble ce genre d’amour ?

La grâce fait la différence

Voici comment j’aime définir le mot grâce : fournir à votre époux(se) ce dont il ou elle a désespérément besoin, mais qu’il ou elle ne mérite pas.

Un mariage devient fondé sur la grâce lorsqu’on choisit à maintes reprises de faire la chose suivante : se traiter l’un l’autre comme Dieu nous traite. Dieu ne garde pas de comptes, ne rappelle pas les blessures, ne nous couvre pas de honte, ne nous ridiculise pas, ne nous compare pas et ne nous ignore pas. Mais il pourrait le faire. Nous lui donnons certainement suffisamment de raisons pour le faire. Mais tout cela nous ramène à notre Sauveur, à la croix et au travail exceptionnel de grâce que Jésus a non seulement fait pour nous, mais veut aussi accomplir à travers nous.

Une chose que Dieu fait gracieusement pour nous individuellement, c’est qu’il libère notre cœur. En fait, il nous offre en tout temps quatre merveilleuses libertés — qu’il peut aussi nous aider à offrir à notre époux(se). Si nous désirons parvenir à nous traiter l’un l’autre comme Dieu nous traite, alors, par sa grâce, les libertés suivantes doivent devenir des principes non négociables au cœur de notre mariage :

  1. La liberté d’être différent. Les lève-tôt se marient avec des couche-tard. Les gens ordonnés se marient avec des gens désordonnés. Et bien sûr, il est tout naturel de présumer que notre façon de faire est la meilleure. Mais la grâce infinie de Dieu ne pense pas ainsi et n’agit pas ainsi. Sa grâce nous montre, par l’exemple, la façon dont nous devrions célébrer les caractéristiques particulières de celui ou celle que nous aimons, pour permettre à cet individu d’être la personne unique que Dieu a créée.
    2. La liberté d’être vulnérable. Lettre de licenciement, enfants qui n’écoutent pas, enfants prodigues qui ne se soucient de rien, erreurs d’investissement ou faiblesses personnelles exposées au public… toutes ces choses ont une chose en commun : la personne touchée se sent extrêmement vulnérable. Quel que soit le problème, Dieu prend soin de nos sentiments avec attention. Il ne banalise pas nos souffrances et ne ridiculise pas nos lacunes. Et nous ne devrions pas non plus agir ainsi envers notre époux(se). Nous n’avons pas à recouvrir nos émotions de vernis pour nous sentir en sécurité en présence de Dieu, et nous devrions nous sentir tout aussi en sécurité avec notre époux(se).
    3. La liberté d’être franc. Dieu voit ce qu’il y a dans nos pensées (Psaume 139) et il compatit avec nos faiblesses (Hébreux 4.15). Si Dieu — qui ne nous doit rien — nous donne la liberté d’être francs avec lui, alors un lien du cœur avec lui devrait nous inspirer à donner à notre époux(se) — à qui nous avons tout promis — la liberté d’être franc avec nous.
    4. La liberté d’apprendre de nos échecs. Quoique Dieu ne nous encourage pas à faire des erreurs, il sait que nous en ferons. Il sait aussi que chaque membre du couple commet des péchés l’un envers l’autre. Que ce soit une série de petits délits quotidiens ou un véritable crime contre nos vœux matrimoniaux, ces péchés peuvent signer la fin d’une relation conjugale ou marquer le commencement d’un amour plus profond et intime. Le résultat de nos péchés envers l’autre dépend de l’état de notre relation avec Jésus. Lorsque nous nous laissons vraiment envahir par la grâce de Dieu, cette même grâce est plus susceptible de nous traverser et d’atteindre notre époux(se).

Il serait donc bénéfique pour tous de se prêcher la Bonne Nouvelle à soi-même chaque jour. En gardant la croix au premier plan de nos cœurs et de nos maisons, la grâce est plus apte à tenir la première place. Il est vrai que la grâce est l’ingrédient manquant dans la plupart des mariages, mais elle est aussi un excellent point de départ pour ces mariages. La grâce de Dieu, c’est la raison pour laquelle il est possible pour deux individus d’échanger leurs vœux dans une complète bulle d’illusion, et de tout de même parvenir à écrire une plutôt belle histoire d’amour.

 

Le Dr Tim Kimmel est le fondateur et le directeur administratif de l’organisme Family Matters et l’auteur de plusieurs livres sur la grâce.

Cet article a paru dans l’édition de décembre 2015 – janvier 2016 du magazine Thriving Family. Tous droits réservés © 2015 par le Dr Tim Kimmel. Utilisation autorisée.